L’enracinement du courant républicain en Corse : l’exemple de la Balagne des années 1870 à la fin des années 1890

La politisation des élites s’affirme peu à peu au cours du XIXe siècle. En Balagne, le courant républicain s’ancre très progressivement à partir des années 1840 après une longue parenthèse.

Il n’existe pas de filiation directe avec les républicanismes modernes qu’il s’agisse du républicanisme paolien ou du jacobinisme révolutionnaire[1].

Après un regain limité des idées républicaines lors de la Seconde République, sous le Second Empire, les républicains se font discrets. A la chute de Napoléon III, ils retrouvent de la vigueur mais leur courant peine à s’enraciner en-dehors du canton de Calenzana et de quelques communes. La crise de mai 1877 n’engendre pas un basculement de la Balagne dans le camp de la République et la conquête de la microrégion s’achève dans les années 1890. Les républicains comptent dans leurs rangs des représentants éminents, tel l’avocat Paul Savelli de Sant’Antonino, un de leurs chefs de file, dès les années 1840, ou les Marini de Calenzana, famille dont la sincérité de l’adhésion est régulièrement remise en cause. Les idées défendues par les républicains sont assez peu évoquées dans notre corpus[2]. Dans la presse, la défense de la démocratie est régulièrement associée à la figure du « bon républicain ». Pourtant, lors des élections, ils utilisent tous les leviers à leur disposition pour s’imposer et ne rompent pas avec les mécanismes préexistants. Les maires qui adhèrent à ce courant, jouent un rôle central dans la républicanisation[3] de l’espace public.

A la fin des années 1860, les Bonapartistes sont largement majoritaires en Balagne dans un contexte où les maires, choisis au sein de la notabilité, ont su s’adapter tout au long du siècle aux changements politiques[4]. Il existe une opposition qui est relativement circonspecte au début du Second Empire. Dans les années qui ont précédé ce régime, le balanin, Paul Savelli[5] de Sant’Antonino, est une figure emblématique du parti républicain[6]. En 1847, il a fondé avec Louis Tommasi, Patrice de Corsi, Ange-Toussaint Padovani et Virginius Casta le Progressif de la Corse[7]. Même s’il réside à Bastia[8], ce notable a favorisé l’implantation des idées républicaines dans sa commune et a pu influencer des notables des villages voisins. En 1848, à Aregno, le conseil municipal et la population « enthousiaste » accueillent l’avènement du nouveau régime aux cris de « Vive la République » et le drapeau tricolore est arboré[9]. Le coup d’Etat de décembre 1851 conduit Paul Savelli et ses amis à être prudents[10], rares sont les élus balanins à faire part de leur désapprobation. Le maire de Pigna, Simon Jean Franceschini, légitimiste, veut quitter sa fonction : « Pendant tout le cours de ma vie, j’ai contracté l’habitude de ne suivre que les inspirations de ma conscience et aujourd’hui il m’est impossible de changer de conduite ». L’adjoint de Ville-di-Paraso démissionne. La nouvelle administration est très efficace : lors des élections législatives de février 1852, Séverin Abbatucci, avec une abstention très faible, réunit100% des suffrages dans toutes les communes balanines hormis Calvi[11].

Sous le Second Empire, en 1865, malgré l’action énergique du sous-préfet bonapartiste François Colonna Leca, la composition de quelques conseils municipaux ne répond pas aux critères sociaux du régime. Selon le représentant de l’Etat dans l’arrondissement de Calvi la présence, en leur sein, d’individus issus du peuple est source de désordres. A Aregno, le seul notable élu est un « fauteur de troubles »[12]. A Lumio, commune natale de François Colonna Leca, le maire légitimiste Jean François Renucoli « a voulu (…) flatter les passions populaires » en laissant de côté les « propriétaires aisés et honorables »[13]. A Calenzana, « la population qui est composée en grande partie de bergers a été persuadée qu’il fallait composer le conseil municipal de gens du peuple intéressés à s’opposer au vote de la rétribution à imposer sur le bétail qui pacage sur de vastes étendues de terres communales et ce dans le but d’envahir les propriétés et d’en venir (…) au bouleversement de la société. (…) M. Bonaccorsi Olinte[14] serait désigné comme l’auteur principal de la propagation de ces idées de subversion. (…) Le conseil est composé en totalité de personnes ne possédant aucune propriété et en grande partie repris de justice »[15].

La chute du Second Empire entraîne à la fois peu de protestations et peu de témoignages d’adhésion, dans la plupart des communes les maires adoptent une attitude attentiste. Rares sont ceux qui ne se conforment pas aux prescriptions des autorités : à L’Ile-Rousse, Nessa ou Avapessa ils ne rendent pas les archives communales, à Moncale le maire n’affiche pas les documents officiels. Dans quelques communes des habitants manifestent leur réprobation : à Lumio des affiches sont déchirées et à Nessa une manifestation « antipatriotique » est signalée[16]. Seules six communes de l’arrondissement proclament leur adhésion à la République (Avapessa, Cassano, Cateri, Montemaggiore, Santa Reparata et Calvi)[17]. Ce faible ancrage républicain est confirmé en septembre 1870 par le sous-préfet Antoine Marie Gandié[18]: « le parti républicain n’est encore qu’une nébuleuse »[19].

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Des enquêtes réalisées par la sous-préfecture de Calvi, au milieu des années 1870[20], démontrent la domination des conservateurs à la tête des conseils municipaux. Quinze maires sur vingt-neuf sont de fervents bonapartistes[21]. Certains « anti-bonapartistes » sont légitimistes[22]. D’autres sont des républicains de différentes tendances : quatre sont modérés[23] et un est radical[24]. Pour quelques maires, le positionnement est plus flou : Jean Gorgonius Orticoni à Monticello est plus républicain que légitimiste ; Charles Vincent Allegrini à Algajola[25] est « indépendant », Don Pierre Simonetti Malaspina à Ville-di-Paraso appartient à une famille légitimiste et a des tendances bonapartistes. Dans le canton de Calenzana, qui s’affirmera comme le principal bastion républicain, les rivalités locales conditionnent le choix des élus : le maire de Lunghignano aux « opinions peu déterminées », « a fait voter pour [le républicain radical] Savelli » car il est adversaire de Marini ; le maire de Montemaggiore vote pour Pozzo di Borgo « question de parti local » tandis que son adjoint Jean Antonini a des « tendances légitimistes » et « vote avec les Marini ». A cette époque, le maire de Calenzana Xavier Marini est qualifié de « très légitimiste »[26]. Dans quelques communes l’adjoint et le maire appartiennent à des partis opposés : les adjoints de Calenzana, de Ville ou de Vallica sont républicains, ces deux dernières communes ont des maires bonapartistes.  

Plusieurs facteurs expliquent la victoire d’Ernest Arrighi de Casanova, duc de Padoue, lors des élections législatives de 1876[27]. Du fait de l’équilibre des forces en présence, les républicains arrivent en tête dans quatre des six communes du bassin de Calenzana[28], Antoine Giudice Graziani est parfois au coude à coude avec Paul Savelli (Calenzana, Montemaggiore ou Zilia). Ce dernier réussit une belle élection dans sa commune, Sant’Antonino (82% des voix). Les républicains font également des scores honorables dans les villages limitrophes de Pigna, Aregno, Avapessa et Cateri. La division des républicains a favorisé la victoire du candidat bonapartiste. Ce succès des conservateurs est facilité par un réseau dense et efficace. Comme en 1872 lors de la campagne menée par Titto Franceschini Pietri, « les curés, les maires, les percepteurs » en ont été des maillons essentiels[29]. Les maires jouent un rôle central. Recrutés dans la notabilité, ils fournissent du travail à une partie de la population et s’inscrivent dans des réseaux d’alliances qui leur permettent d’avoir des relais dans de nombreuses communes. Le parti conservateur bénéficie également de la présence à Monticello du cousin germain du père d’Ernest Arrighi de Casanova, le magistrat Napoléon Arrighi. Marié à Maria Comtessa Giorgi, il entretient des relations étroites avec des notables de toute la Corse[30]. En Balagne, sa fille Marie a épousé en 1855 le juge de paix Jean Gorgnius Orticoni[31], maire de Monticello en 1874. Joseph Arrighi, marié à une de ses nièces[32], est président du tribunal de Calvi dans les années 1870. Ces réseaux intègrent des personnalités continentales. Le conservateur Santo Santelli est « parent »[33] de Monseigneur Benedetti[34] et de Théodore Troplong[35]. Dans le camp républicain, des notables tissent probablement des relations avant leur ralliement. Les Graziani de Cassano sont proches d’Albert Auguste Huet, juge d’instruction, député du centre droit entre mai 1869 et septembre 1870[36] ; Léopold Bartoli est soutenu par le baron Dominique Emile Arsène Jorant[37] puis par le sénateur républicain du Doubs Antoine Alexis Monnot-Arbilleur[38]. Dans les deux camps, les réseaux ne recoupent pas les partis et ils évoluent en fonction des circonstances.

Pendant le Second Empire, les sous-préfets sont des acteurs essentiels de la vie politique. Dans l’arrondissement de Calvi, l’avènement de la République marque une double rupture. Les sous-préfets restent moins longtemps en poste. De septembre 1870 au printemps 1873, deux sous-préfets balanins se succèdent : Antoine Marie Gandié et Nicolas Marini. Même s’ils sont socialement bien insérés, leur action énergique n’a pas les effets escomptés lors des élections. Le deuxième changement intervient à partir de la révocation de Nicolas Marini en 1873, l’administration choisit un personnel continental qui agirait avec davantage de partialité car ces individus seraient « presque toujours inaccessibles aux influences et aux intrigues locales »[39]. Emile Laporte cède sa place en 1874 au baron Paul Camille de Montrond qui est suivi par Raoul Regnault d’octobre 1875 à mai 1877[40]. Ils ne veulent pas s’éterniser à Calvi, dès 1876 Raoul Regnault veut partir. Durant cette période, les sous-préfets continuent à être des agents électoraux, plus ou moins efficaces.

Le camp républicain s’ancre progressivement en Balagne. La crise de mai 1877, qui s’inscrit dans une période d’instabilité, a un rôle limité. L’adhésion de notables éminents favorise son enracinement mais les divisions perdurent.  

De 1876 à 1878, dans quelques communes la lutte entre anti et pro-bonapartistes est acharnée. Ces tensions, lors des élections municipales et des élections législatives, sont bien documentées à Aregno[41]. En mars 1876, elles se traduisent par des observations consignées au procès-verbal : un électeur non inscrit a voté pour Graziani, un notable, partisan du parti conservateur, a tenté de subtiliser la liste d’émargement. Antoine Giudice Graziani arrive en tête avec 90 voix, Paul Savelli, originaire de la commune voisine, en obtient 70 et le duc de Padoue, 10[42]. Pourtant, malgré cette domination écrasante des républicains, le conseil municipal est divisé à égalité entre anti et pro-bonapartistes. En octobre 1876, lors de l’élection du maire au troisième tour de scrutin, le républicain Pierre Jean Marcelli obtient sept voix et Pierre Paul Negretti six, alors qu’il n’y a que douze votants. Une plainte est déposée pour fraude et trois conseillers municipaux sont inculpés. En janvier 1877, le conservateur Simon Bartolini se retrouve à égalité avec Antoine Suzzoni ; le premier qui est plus âgé est déclaré élu. Six conseillers contestent cette désignation : Bartolini est prêtre, cette fonction est incompatible avec celle de maire. En mars, seuls huit conseillers municipaux prennent part au vote. Deux bulletins sont blancs, le républicain Pierre Jean Marcelli est élu. Deux membres du conseil municipal dénoncent l’élection d’un maire condamné pour fraude électorale[43]. En mai, Charles Marie Franceschini est élu en l’absence des conseillers de droite mais il est révoqué quelques mois plus tard. Le conservateur Pie Louis Marcelli devient maire en 1878. Son camp a réussi à modifier radicalement les résultats des législatives d’octobre 1877 : le duc de Padoue obtient 108 suffrages. L’instabilité est également forte dans d’autres communes: à Muro, cinq maires se succèdent en deux ans ; à Moncale, le républicain Pierre Jean Maraninchi, écarté au profit de Pierre Castellani, retrouve son poste en janvier 1878 ; à Santa Reparata, Jean Baptiste Lanzalavi qui remplace le républicain Pierre Angeli en 1875, cède temporairement la place à Guy Marchetti d’octobre à décembre 1877, puis le conservateur Pascal Galeazzi devient maire pour plusieurs décennies à partir de 1878 ; à Lumio, le conservateur Joseph Félix Colonna Leca remplace le républicain Pierre Jean Renucoli en 1877[44].

Après la crise de mai 1877, l’administration préfectorale joue pleinement son rôle pour assurer la victoire des conservateurs lors des législatives d’octobre. Les maires d’Aregno[45], de Calenzana[46], de Calvi, de Moncale et de Muro sont révoqués. Le maire de Calvi, Léopold Bartoli, nommé en 1870 à l’âge de 28 ans, est remplacé par Laurent Capifali président du comité bonapartiste. Pourtant, en avril 1876, l’attitude politique de Léopold Bartoli est qualifiée des « plus correctes »[47] et en juin le procureur de Bastia, Alexis Ballot-Beaupré, signale ses « opinions conservatrices »[48]. Il ne fait pas preuve de partialité dans le cadre de ses fonctions judiciaires[49]. Ce jeune homme intelligent qui dispose d’une solide assise économique est probablement considéré comme dangereux. Dans le milieu judiciaire, le procureur de la République de Calvi Pierre Murati[50] est nommé à Corte à la place d’Antoine Eugène Pompei[51], il est remplacé par Toussaint Angeli[52]. En août, Alexandre de Figarelli, qui reste jusqu’au 5 décembre 1878, prend le relais[53]. La majorité des juges de paix sont maintenus dans leurs fonctions. Cependant, à Muro l’anti-bonapartiste Antoine Pierre Renucoli est remplacé par Flach[54]. Ernest Arrighi de Casanova est largement réélu avec 3 420 voix contre le républicain Nicolas Marini qui en recueille 1 317. Le duc de Padoue progresse de près de 1 000 suffrages en quelques mois, son adversaire en réunit 1 000 de moins que le total des voix des deux candidats républicains, Antoine Giudice Graziani et Paul Savelli, en 1876. Cette candidature unique n’a pas permis de créer une véritable dynamique. Nicolas Marini arrive en tête dans seulement quatre communes, Calenzana, Moncale, Montemaggiore et Sant Antonino.

Cependant, le début des années 1880 marque un affermissement progressif du parti républicain. Ce courant bénéficie d’un appui plus efficace des sous-préfets en poste à partir de janvier 1878. Après une période de forte instabilité qui a débuté en mai 1877, durant laquelle trois sous-préfets se succèdent, les autorités nomment des Balanins. Le Calvais Léopold Bartoli est en poste jusqu’à son décès en avril 1880, Nicolas Marini, qui le remplace, reste en fonction jusqu’en 1884[55]. En 1881, son action énergique a facilité l’élection du candidat opportuniste Antoine Giudice Graziani face au radical Paul Savelli. Cependant, les républicains sont confrontés à plusieurs écueils. Leurs divisions, le mode de scrutin (à liste lors des législatives de 1885) et le soutien de figures éminentes à leurs adversaires engendrent plusieurs échecs aux législatives de 1885 et de 1889. En 1885, le député sortant n’est pas réélu ; en 1889, le marquis de Villeneuve remporte les élections face au républicain Toussaint Malaspina. Le candidat boulangiste dispose de nombreux atouts. Marié à Jeanne Bonaparte, fille du prince Pierre, il peut compter sur de solides relations, la présence de comités électoraux actifs et d’importants moyens financiers. La division des républicains et le désistement orchestré par Emmanuel Arène d’Etienne Palasne de Champeaux et Antoine Giudice Graziani en faveur de Malaspina n’ont pas permis de créer une dynamique. Quelques années plus tard, le ralliement de Sébastien Gavini à la République, en 1892, permet l’achèvement de la conquête de la microrégion.

            Durant cette période, les Marini de Calenzana sont un bon exemple d’une famille dont l’ancrage républicain est régulièrement contesté. Ils sont incontestablement un maillon essentiel du renforcement de ce camp. Cet investissement politique au niveau régional est l’aboutissement d’une stratégie d’affirmation sociale. Nicolas et son frère Antoine Marini s’inscrivent dans une lignée impliquée dans la gestion des affaires municipales. Leur grand-père, Nicolo, a été maire de Calenzana, leur père Xavier l’est aussi dans les années 1870. Ils ont été conseillers généraux. Plusieurs leviers leur ont permis de renforcer leur pouvoir et d’étendre leur clientèle. Il s’agit de deux éléments essentiels pour réussir en politique. Ils ont consolidé leur assise économique[56]. En 1871, Antoine et Nicolas Marini concluent des unions matrimoniales qui leur permettent de disposer de numéraire. Le premier épouse Maria Antonia Cora, une portoricaine, veuve du négociant Louis Mariani ; son frère se marie avec la nièce de sa belle-sœur. En 1872, ils héritent de leur tante Marie Fabiani veuve Marini[57]. Cette famille a aussi investi dans l’éducation[58], ils exercent la profession d’avocat qui leur permet de compléter leurs revenus, d’étendre leur réseau et de tisser des liens avec les autorités. Dans leur fief de Calenzana, Xavier Marini rassemble de nombreux suffrages : en 1871, il obtient 311 voix sur 317 votants ; en 1877, 346 sur 351 et en 1881, 288 voix sur 292. A noter, que Xavier Marini est absent du conseil municipal entre 1874 et 1877[59].

Quand les Marini rejoignent-ils le camp républicain ? Dans les archives préfectorales et administratives, ils sont présentés comme proches des légitimistes. Le comte Pozzo di Borgo intervient régulièrement pour soutenir Nicolas Marini. Ce dernier est candidat « légitimiste »[60] lors des cantonales en 1871. Bien qu’appuyé par le sous-préfet Antoine Marie Gandié, il essuie un échec retentissant face au républicain Antoine Fabiani[61]. En décembre, Nicolas Marini devient sous-préfet de Calvi. Cette nomination est un « scandale » car selon Antoine Fabiani, il utilisera cette fonction pour gagner des adhérents à son parti auquel « il appartient corps et âme »[62]. Il est révoqué lors de la crise du 24 mai 1873. Les Bonapartistes, qui en seraient les principaux artisans, et les républicains sont satisfaits mais les raisons de sa révocation ne sont pas explicitées. L’adhésion de Nicolas Marini au camp républicain ne fait aucun doute en 1877. Candidat face au duc de Padoue, il s’est « dévoué » « dans l’intérêt de la République pour obéir aux instructions données par Gambetta »[63]. Dans son camp, Nicolas Marini a de nombreux adversaires et la sincérité de son engagement est régulièrement remise en cause. Les relations sont tendues avec Antoine Fabiani, Léopold Bartoli[64] et les partisans de Paul Savelli. Le clan Fabiani, de Calenzana, rapporte des témoignages sur la duplicité des frères Antoine et Nicolas Marini. En 1881, ils ont soutenu leur beau-frère Olinthe Buonaccorsi, bonapartiste et « patronné » par administration du 16 mai ainsi que le candidat de son parti Franceschi contre Fabiani. Près de 10 ans plus tard, selon une lettre publiée par le journal républicain le Pascal Paoli l’« attitude politique [de Nicolas Marini] n’a jamais inspiré la moindre confiance au parti républicain de notre arrondissement »[65]. Ces critiques amènent Nicolas Marini à défendre la sincérité de son engagement. En 1877, il écrit au ministre de l’Intérieur :

« mes opinions républicaines sont connues de tout le monde, non seulement dans l’arrondissement mais encore dans toute la Corse : ma famille une des plus importantes de l’arrondissement et jouissant d’une influence incontestée a toujours servi la cause de la liberté, soit sous l’Empire en combattant ouvertement les candidatures officielles, soit après en mettant son influence au service des candidats républicains, et cela à toutes les époques et sous toutes circonstances politiques »[66].

Parmi les républicains, Nicolas Marini a aussi des soutiens. Certains semblent réécrire son parcours politique. Dans une note qui n’est pas datée, il est indiqué qu’en 1873 il était républicain et à la tête de l’opposition contre M. Abbatucci. En juillet 1879, Antoine Giudice Graziani appuie la demande de réintégration de Nicolas Marini dans le corps préfectoral qui serait accueillie avec « joie par les républicains de la Corse ». Il s’est « constamment » prononcé en faveur du candidat républicain[67] et il est attaché aux institutions. Des articles de journaux contenus dans son dossier administratif infirment ces propos. Nicolas Marini est réintégré. Il a une action énergique en faveur d’Antoine Giudice Graziani lors des législatives de 1881 durant lesquelles « M. Savelli vieux républicain en Corse depuis 1848 » pâtit de ses interventions[68]. Le soutien d’Antoine Giudice Graziani n’est pas dépourvu d’arrière-pensées, il dispose ainsi à la tête de l’arrondissement d’un agent électoral influent pour contrer le radical Paul Savelli. 


Figure 1 : articles extrait du dossier de Nicolas Mariani (AN, Dossier Marini, 101-958-140).

Tous s’accordent sur un fait : Nicolas Marini est un « homme de parti ».

Dans la documentation, la sincérité de l’engagement et l’adhésion aux valeurs de la démocratie sont présentés comme essentielles pour tout « bon républicain ». Pourtant, en matière électorale, les républicains utilisent les mêmes ressorts que leurs adversaires. Les maires de ce courant ne se distinguent pas fondamentalement des conservateurs dans leur gestion quotidienne. Un élément de différenciation est à souligner : ces maires sont des piliers de l’introduction des symboles républicains dans l’espace public.

Durant le Second Empire et par la suite, les républicains se présentent comme les défenseurs des principes et des valeurs de 1789 face aux bonapartistes partisans d’un régime autoritaire. La République et la démocratie permettront à la population de s’émanciper de la tutelle des grandes familles de la notabilité. S’il est vrai que le personnel politique républicain intègre des individus aux origines plus modestes, les notables restent des valeurs sûres. Ainsi, en 1888, le journal républicain L’Indépendance corse appuiera à Calvi la liste soutenue par Etienne Palasne de Champeaux notamment car elle rassemble des représentants « de toutes les notabilités de Calvi et (..) des anciennes familles »[69]. Le choix des candidats ne repose pas sur des critères essentiellement politiques, ni sur la sincérité de leur engagement. L’insertion locale est primordiale. En 1886, un article du Bastia-Journal qui recense les candidats pressentis pour les élections cantonales dans l’arrondissement de Calvi résume bien les éléments pris en considération. Le positionnement politique est mentionné : l’avocat Casta est « radical » et « ardent » ; le docteur Allegrini est « indépendant » tandis que Martin Marchetti, conseiller général sortant à Calvi, et Sébastien Savelli, candidat à L’Ile-Rousse, sont de « bons républicains »[70]. L’auteur met en avant d’autres critères : la légitimité du suffrage universel[71] et l’inscription dans une lignée républicaine[72]. Le statut social n’est pas à négliger : c’est le principal atout du docteur Allegrini, il est bien implanté et soigne les gens « sans rien demander ».

Les pratiques lors des élections ne sont pas toujours en adéquation avec le respect des principes démocratiques. Au début des années 1880, les Marini sont accusés par le clan Fabiani d’avoir exercé des pressions voire des violences sur des électeurs. Ils « obligent » les « petits » fonctionnaires, cantonniers, facteurs ou gardes forestiers à voter « avec » leur « parti ». En 1881, la veille des élections municipales de Calenzana, deux hommes armés[73] se sont présentés au domicile du conseiller municipal Petrucci et l’ont menacé de mort si lors des prochaines élections il ne votait pas en faveur de Xavier Marini[74]. Ces pressions s’exercent en-dehors du canton de Calenzana. En janvier 1877, Pierre Antoine Negretti d’Aregno a été destinataire de trois lettres de Marini[75] « nelle quali mi pressava ed importunava di votare per Martelli »[76]. Des républicains sont poursuivis pour fraudes : Pierre François Angeli à Santa Reparata en 1871, le maire d’Aregno et son adjoint en 1876[77], les membres du bureau électoral de Sant’Antonino en 1876 ou ceux de Cateri en 1886. Le maire et l’adjoint de Cateri sont suspendus pour ce motif en 1888[78]. Leurs adversaires politiques font aussi l’objet de poursuites[79]. Lors des élections législatives de 1889, les partisans du républicain Malaspina et du boulangiste Christian de Villeneuve accusent le camp opposé d’avoir eu recours à des procédés illégaux : menaces[80], séquestration d’électeurs[81], pressions, achats de voix et promesses d’emplois[82] pour de Villeneuve ; achats de voix[83] et menaces de révocation[84] pour les républicains. Lors des campagnes électorales, les soutiens se négocient. En 1887, le conseiller général opportuniste de Calvi, Martin Marchetti, présenté l’année précédente dans l’article du Bastia-Journal comme un « bon républicain » démissionne pour permettre à Emmanuel Arène de prendre sa place en échange d’un poste de percepteur à Sartène. Dans l’optique de remporter ces élections, Emmanuel Arène promet au maire de Calvi, François Joseph Puccinelli, les palmes académiques et la nomination d’un de ses parents comme sous-préfet[85]. Ces tractations n’ont pas les effets escomptés.

            La multiplication des ralliements conduit des observateurs à s’interroger sur la sincérité de l’engagement des nouveaux républicains. Les ralliés sont parfois qualifiés d’« ambitieux » voire d’« Hypocrites »[86] et en mars 1895, dans le Courrier de la Corse, un journaliste écrit : « on a tellement brouillé les cartes qu’à l’heure actuelle, il n’y aurait plus, en Corse, que des républicains… les uns plus républicains que les autres »[87]. Paul Savelli incarne la figure du « bon » républicain. Ce « doyen » est doté de nombreuses qualités : il est « l’incorruptible porte drapeau »[88], a une « foi robuste » en la République et il est resté fidèle à ses idées malgré les difficultés rencontrées (« l’idée est tout, les hommes ne sont rien »)[89]. Mais malgré les éloges, la polémique liée à l’érection d’une statue en son honneur après son décès en 1887 témoigne de l’existence de profondes tensions et rivalités au sein de son camp[90].


Figure 2 : Bastia-Journal, BNF, 22.08.1890.

Figure 3 : L’indépendance corse, BNF, 8.05.1887.

Dans la documentation, peu d’éléments permettent de distinguer une gestion municipale républicaine d’une gestion conservatrice. Quelques mesures pourraient être liées à un républicanisme « combattant ». A Cateri, en 1898, le maire interdit la réunion de la confrérie du Très Saint Sacrement et les sorties du cortège avec bannières et enseignes, officiellement en raison de querelles intestines. Les autorités préfectorales s’opposent à cet arrêté. En 1881, le maire de Muro autorise la mendicité. Son arrêté, rejeté par la préfecture, est-il lié à des contingences sociales ou clientélistes ? L’assistance qui devrait être une priorité pour les maires républicains devient un enjeu partisan, l’appartenance au bon parti justifie les secours : le feu mari de Marie Thérèse Salducci « a toujours été un bon républicain »[91], Alban Polloni est un républicain convaincu et il a toujours voté pour le candidat républicain, Cyprien Martelli « a toujours voté pour le candidat de l’administration a toujours été républicain »[92].

Les maires républicains se différencient de leurs homologues conservateurs par le rôle central qu’ils jouent dans la républicanisation de l’espace public et dans la naissance d’une sociabilité républicaine festive dont le 14 juillet devient le point d’orgue[93]. La description des festivités organisées en 1886 à Vescovato pourrait être transposée à d’autres communes, en Balagne notamment. Les symboles républicains sont présents dans l’espace public : l’hôtel de ville est pavoisé et la Marseillaise est chantée. Un banquet avec du champagne est organisé, la population est associée par le biais d’une fête populaire et d’un feu d’artifice[94]. Ces symboles sont aussi convoqués pour célébrer les victoires électorales. En septembre 1896, un journaliste de L’Aspic présente la Marseillaise comme une marque d’adhésion et les anciennes élites conservatrices ralliées la chanteraient d’ailleurs à contrecœur, lui préférant Reine Hortense[95]. Les symboles républicains ne sont pas unanimement adoptés et partagés. Le 14 juillet donne parfois lieu à des manifestations d’hostilité. En 1881, à Speloncato, pendant plusieurs heures, des bonapartistes se livrent à des jets de pierres, profèrent des injures, s’en prennent aux maisons illuminées et pavoisées. Le maire qui n’est pas intervenu est révoqué[96]. En 1893, un incident est signalé à Avapessa. Le 14 juillet n’a pas pu être célébré car le curé n’a pas permis d’accéder au clocher. Le 13 au soir le maire, qui se trouvait sur la place avec des conseillers municipaux et des notables pour « commencer la fête », a envoyé le garde-champêtre et l’appariteur chercher la clé du clocher. Le desservant a refusé de la leur remettre.


Figure 4 : Lettre du maire d’Avapessa (ACdCB, 1Z4).

Le clocher n’a pu être ni pavoisé ni illuminé et le début des festivités n’a pu être annoncé car « dans nos villages de campagne les cloches seules annoncent les fêtes ». Le maire, qui n’a pas trop insisté, espère que l’administration « jugera sévèrement » l’attitude de l’abbé Peretti[97].

Le chant Reine Hortense, précédemment évoqué, est utilisé par les antirépublicains comme un contre-symbole. Lors de la campagne des législatives de 1889, le curé Blasini d’Aregno remplace le Domine Salvam fac Republicam[98] par l’air de la Reine Hortense et après la victoire de de Villeneuve il fait jouer une chanson populaire finissant par à bas la République[99]. Les républicains regrettent que les symboles de la République n’accompagnent pas tous les évènements publics importants. En 1886, lors de la foire de L’Ile-Rousse, Auguste Costa s’étonne que la Marseillaise n’ait pas été chantée et qu’un cri « Vive la République » ait semblé indigner la foule. Pour honorer la République, seule une embarcation portait l’inscription « RF »[100].

            Le républicanisme s’enracine progressivement en Balagne. Cette affirmation est portée par une dynamique générale mais aussi par le ralliement de notables qui cohabitent avec des républicains de la première heure. Comme les conservateurs, les élites républicaines assimilent des méthodes politiques nationales tout en les arrimant à des mécanismes préexistants. Il ne permet pas l’émancipation politique de la population. Au-delà des dissensions idéologiques, les conflits de personnes sont nombreux. La sincérité de l’adhésion est un élément important. Les idées sont très peu évoquées hormis les grands principes républicains qui reviennent régulièrement dans les articles de presse. Cette affirmation passe par l’introduction d’une sociabilité et de symboles républicains dans l’espace public qui se heurte parfois à des oppositions. Les tensions demeurent vives jusqu’à la fin des années 1890.

A l’aube du XXe siècle, le courant radical s’implante solidement en Balagne. Le canton de Calenzana, qui a été un des premiers bastions républicains, en devient un pilier.

[1] La période 1789 à 1815 a été ponctuée par de nombreux épisodes de violence.

[2] Fonds préfectoraux (Archives de la Collectivité de Corse de Bastia et d’Ajaccio (ACdC)), Presse régionale (Bibliothèque Nationale de France (BNF), ACdC, en ligne), Dossiers de fonctionnaires préfectoraux (Archives Nationales (AN)).

[3] Lacombrade P., La « républicanisation » de l’espace public montpelliérain. Politique et géographie symbolique dans le « Midi rouge » (1848-1914), Annales du Midi, 2012, p. 507-522 ou Guarrigues J. et Lacombrade P., « Chapitre 5 : la naissance de la IIIe République (1870-1885), Armand Colin, 2019, p. 129-160, un encadré est consacré à la Corse (p. 155).

[4] Agulhon M., Les maires de France du Consulat à nos jours, Publications de la Sorbonne, 1986.

[5] Né en 1815 à Sant’Antonino.

[6] Bastia-Journal, 26.06.1886 ; L’indépendance corse : journal républicain, 8.05.1887 ; article du Petit Var cité par le Bastia-Journal, 22.07.1888, selon cet article il serait sur la « brèche » depuis les années 1830.

[7] Ce journal est supprimé en décembre 1851. En 1869, Paul Savelli crée avec d’autres républicains La Revanche et participe à la fondation du comité central républicain de Bastia.

[8] En 1850, Paul Savelli épouse à Pino, Marie Tomasi. A Sant’Antonino, son frère Jacques, marié à Madalena Savelli Spinola, lui sert de relais.

[9] ACdCB, 1Z130.

[10] Certains républicains sont été arrêtés, comme Patrice de Corsi et Ange Toussaint Padovani en 1858.

[11] Il y a 100% de votants dans 7 communes, moins de 5% d’abstention dans 6. La proportion d’abstentionnistes dépasse 10% à Nessa et à Speloncato. A Calvi, il y a un bulletin au nom de Hyacinthe Giubega et un blanc, ACdCB, 1Z83.

[12] Cette affirmation est erronée : Dominique André Croce, Jean François Giudicelli ou Jean François Savelli appartiennent à la notabilité. Les conseillers d’origine modeste sont parfois de fervents bonapartistes comme Jean Baptiste Bartolini. L’avocat Don Félix Marcelli est le « fauteur de troubles ». En 1843, sa fille a épousé un négociant marseillais, domicilié à Bastia, saint-simonien, Casimir Cayol. Dès 1852, Pierre Jean Martelli devient un des piliers du camp républicain, il affirme son opposition en contestant l’élection du maire bonapartiste Jean Negretti.

[13] ACdCB, 1Z83. Sur les rivalités entre Colonna Leca et Renucoli à Lumio se référer à Alberti J. – L., « Hérédité et pouvoir local », Etudes corses, 1994, n°42-43, p. 123-186.

[14] Dans les années 1880, il est présenté comme bonapartiste.

[15] ACdCB, 1Z84.

[16] ACdCB, 1Z130.

[17] Pellegrinetti J.-P., La Corse et la République, la vie politique de 1870 à 1914, Thèse : histoire contemporaine, Sophia Antipolis, 2000, p. 416.

[18] Il a remplacé Pierre Louis de Zerbi arrivé à Calvi en 1867.

[19] Ibidem, p. 437-438.

[20] ACdCA, 2M193. Les résultats de ces enquêtes sont à prendre avec précaution.

[21] Avapessa, Belgodere, Corbara, Costa, Feliceto, Lavatoggio, Mausoleo, Nessa, Novella, Palasca, Pigna, Pioggiola, Speloncato, Vallica et Zilia, à Muro, le maire est bonapartiste mais peu actif.

[22] Calenzana, Cateri, Lumio ou Moncale.

[23] Aregno, Sant’Antonino, Santa Reparata et Cassano.

[24] Occhiatana.

[25] Son adjoint est « antibonapartiste ».

[26] Jean-Paul Pellegrinetti le classe parmi les maires républicains, op. cit., p. 1000-1001.

[27] Il y a 6 493 inscrits.

[28] Calenzana, Cassano, Montemaggiore et Zilia.

[29] Cité par Pellegrinetti J.-P., op. cit., p. 35.

[30] En 1870, il intervient en faveur de deux Cortenais poursuivis dans le cadre d’une tentative de meurtre. Il contacte des personnalités éminentes : Jacques Mathieu Guasco, François Lota, Jean Gaudin, le major Dominique de Casabianca, le banquier Joseph Sébastien Gregori ou le baron Jean Baptiste Galeazzini, Fonds privé.

[31] Un autre mariage consolide son réseau politique : en 1852, sa fille Marie Lucie épouse le médecin Jean Frédéric Grazietti de Vezzani qui sera maire.

[32] Marie Rose Sébastienne Guelfucci.

[33] Courrier daté de 1865.

[34] S’agit-il de Vincent ambassadeur de France à Berlin ?

[35] Il a séjourné en Corse, s’est marié avec la bastiaise Marie Antoinette Lota.

[36] Ils sont témoins lors du mariage de Jean Noël Graziani en 1868.

[37] Il est titulaire de plusieurs distinctions. En 1872, procureur général à Bastia, il exprime son étonnement de ne pas voir Bartoli nommé juge suppléant. AN, Léonore et Dossier Bartoli.

[38] https://www2.assemblee-nationale.fr/sycomore/fiche/(num_dept)/8714 Il décède au cours de son mandat.

[39] AN, Dossier Bartoli, 101-958-142.

[40] Chevalier de la Légion d’honneur en 1895. Il a été chef de cabinet du préfet de l’Hérault, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Oise. Il est nommé le 11 mai 1877 secrétaire général dans le Gard.

[41] A plusieurs reprises les tensions politiques ont donné lieu à des contestations : en 1843, plusieurs plaintes sont déposées contre le maire à propos de la liste électorale, document qu’il a refusé de montrer ; en 1852, l’élection du maire est contestée.

[42] Profitant d’une discussion, Pie Louis Marcelli s’est « furtivement » saisi de la liste d’émargements mais ne parvient pas à sortir du bureau de vote.

[43] Il en est de même pour son adjoint.

[44] Il reste en fonction jusqu’en 1887. Pellegrinetti J. – P., op. cit., p. 1013-1018.

[45] Sur le registre des élections, le maire et son adjoint sont indiqués « démissionnaires », ACdCB, 1Z130. 

[46] Alexandre Fabiani est remplacé par le premier adjoint Pascal Marini, ACdCB, 1Z130.

[47] Le courrier est écrit par le premier président, Louis Morcrette. Il occupe cette fonction de 1873 à 1883. Décrit comme « très libéral » dans un article du Figaro (13.09.1883), il a bénéficié de l’appui de Jacques Pierre Abbatucci lorsque celui-ci était Garde des Sceaux (1852-1857). Il a obtenu la Légion d’honneur en 1867. Le poste de substitut est également convoité par François Xavier de Casabianca, père de Pierre Paul, AN, Dossier Bartoli, op. cit.

[48] Il est en poste à Bastia de juillet à décembre 1876.

[49] « (…) les antécédents de M. Bartoli me font espérer qu’il n’apporterait pas dans l’exercice de ses fonctions cet esprit de partialité par lequel se signalent ici quelques magistrats lorsqu’ils doivent statuer sur des affaires concernant des compatriotes qui sont leurs adversaires personnels ou politiques ». AN, Dossier Bartoli, op. cit.

[50] Juge suppléant à Bastia en 1866, substitut du procureur à Corte à partir de février 1870, puis à Bastia en février 1871. Journal officiel de la République, Débats parlementaires, 28.03.1895, Farinole évoque les « hostilités » envers le parti républicain. Il est révoqué pour son implication lors des élections du 14 octobre 1877. Il aurait tenu les propos suivants : « Empoignez toute cette canaille qui crie : Vive la République ».

[51] Journal officiel de la République, Débats parlementaires, 28.03.1895.

[52] En août, il est nommé à Sétif et démissionne en décembre, Annuaire de la magistrature, 1878. Il revient en tant que substitut à Bastia en 1879, AN, Léonore.

[53] Annuaire de la magistrature, 1891. Ce bonapartiste a rejoint le camp républicain. En 1887, son ralliement est évoqué dans un article intitulé « Un procureur zélé » de La Défense : journal des intérêts conservateurs et révisionnistes de la Corse (23.07) : il « a naturellement voulu conserver sa place sous la République et il n’a rien négligé pour cela ».

[54] Son prénom n’est jamais mentionné dans le Journal officiel de la République, il est démissionnaire en 1879.

[55] Il est remplacé par Alfred Fabre.

[56] Xavier Marini a un revenu important de 6 000 francs, ACdCB, 1Z130.

[57] Son testament établi en 1869 est contesté par son neveu Antoine Jean Fabiani. Selon lui, sa tante aurait été isolée et les deux frères Marini l’auraient empêchée de se soigner correctement. Atteinte d’un cancer au sein, ils l’auraient dissuadé de consulter à Montpellier et conseillé d’être suivie à Bastia.

[58] En 1854, Nicolas obtient au collège de Calvi le premier prix de récitation, de version et de thème en latin, le deuxième d’orthographe et de géographie, Le Journal de la Corse, 08.08.1854.

[59] ACdCB, 1Z130. 

[60] AN, Dossier Marini, 101-958-140.

[61] Ibidem.

[62] Ibidem.

[63] Ibidem.

[64] Des tensions entre Nicolas Marini et les Bartoli sont attestées, Pellegrinetti J.-P., « Sociabilité républicaine en Corse de 1870 à 1914 : Mutation d’une société », Cahiers de la Méditerranée, n°56, 1, 1998. Regards sur la Méditerranée, p. 139-140.

[65] AN, Dossier Marini, 101-958-140. 

[66] Ibidem.

[67] L’ancienneté de son engagement est rappelée par le Pascal Paoli, Nicolas Marini est qualifié de républicain « des premiers jours »AN, Dossier Marini, op. cit., mai 1890.

[68] Ibidem. Ce courrier émanant du cabinet du préfet évoque des pressions sur les fonctionnaires notamment un rapport de 1882 dans lequel il demandait une mesure de rigueur contre un instituteur « Républicain Savelliste ».

[69] L’indépendance de Corse, 30.05.1888.

[70] Le terme est employé pour Martin Marchetti.

[71] Casta a réuni de son propre chef le comité républicain dont Nobili Savelli aurait dû avoir l’initiative de la convocation car il est élu.

[72] Sébastien Savelli, procureur à Apt, est le neveu de Paul Savelli Il n’arrive pas à s’imposer en 1886. Nommé à Bastia, il remporte les élections cantonales suivantes.

[73] Ils disent être « bandits ».

[74] La personne menacée est un des plus ardents promoteurs de la candidature Fabiani. Dans les années 1850, plusieurs bandits présents en Balagne jouent un rôle dans les luttes électorales. Selon Pau Bourde «  le maire de Pigna n’aurait point ceint l’écharpe s’il n’avait pas pour oncle le bandit Alessandri. », « En Corse, l’esprit de clan, les mœurs politiques – les vendettas et le banditisme », Calmann Lévy, 3ème édition, 1887.

[75] Le prénom n’est pas précisé.

[76] Fonds privé.

[77] Ils sont condamnés.

[78] Le maire est condamné à un mois de prison par la cour d’appel de Bastia.

[79] Entre 1870 et 1890, dix-sept plaintes pour fraudes ont été recensées dans le registre du tribunal civil de Calvi, il n’est pas toujours possible de savoir si elles concernent des républicains ou des conservateurs, mais des membres des deux camps sont identifiés ACdCB, 3U et E/142/23.

[80] Leandri menace à Aregno un sous-préfet de révocation si son frère continue à faire campagne pour Malaspina.

[81] A Calvi, Calenzana, Cassano, Mausoleo, Montemaggiore, Muro, Olmi Cappella ou encore Palasca. Cette pratique est relativement courante. En 1865, des électeurs auraient été enfermés dans la maison du frère du maire de Lumio Jean-François Renucoli.

[82] Les électeurs de Villeneuve sont amenés sur le lieu du scrutin et rémunérés 40 francs par bulletin, Pellegrinetti J.-P., La Corse et la République…, op. cit., p. 40-41.

[83] A Aregno, Pierre Jean Casta, « grand agent électoral » de Malaspina aurait promis 300 francs à Mathieu Carlotti, l’ancien maire aurait promis 200 à 300 francs à Barthélémy Antonini pour sa voix au deuxième tour et 50 à 60 francs par voix en faveur du candidat républicain à Praoli, Journal officiel, 16/03/1890.

[84] Les maires de Calenzana (Olinthe Bonaccorsi, remplacé par Ignace Marini) et Manso (Jean Thomas Acquaviva) sont révoqués.

[85] La Défense, 10.1887. L’ajaccien Joseph Debonne est sous-préfet d’août 1887 à mai 1889. Dans un article de L’Aspic, Puccinelli est présenté comme un « vieux démocrate », un « républicain de la première heure », qui « a lutté [et] souffert pour la République » (18.05.1906).

[86] L’Aspic, 10.09.1896. La presse soutenant la candidature de de Villeneuve reprend des arguments similaires.

[87] Le Courrier de la Corse, 13.03.1895.

[88] Pellegrinetti J.-P., « Sociabilité républicaine…, op. cit., p. 140.

[89] L’indépendance corse, 8.05.1887.

[90] Articles de L’indépendance corse ou de La Défense, mai et juin 1887.

[91] Barré.

[92] ACdCB, 1Z.

[93] Marianne est peu présente. Elle est recensée à L’Ile-Rousse, Lumio et Ville di Paraso. Pellegrinetti J.-P., La Corse et la République…, op. cit., p. 398

[94] Bastia-Journal, 19.07.1886.

[95] L’Aspic, 10.09.1896.

[96] Pellegrinetti J. – P., La Corse et la République…, op. cit., p. 385.

[97] ACdCB, 1Z.

[98] Seigneur sauve la République.

[99] Journal officiel, 16.03.1890, Le Drapeau, 16.03.1890.

[100] Ibidem, 6.09.1886.

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