Regards sur l’éducation en Corse à la Belle Époque

Résumé :

Cet article vise à dresser un état des lieux de l’histoire de l’éducation en Corse durant la Belle Époque. Période charnière pour le développement de « l’instruction » à travers la massification de l’enseignement primaire public et en corollaire par ce biais de l’accélération du mouvement d’acculturation, de francisation de la société corse. En s’appuyant sur un ensemble de sources (archives administratives, presse insulaire, fonds Ozouf…) nous avons pu tirer des lignes de force. Effectivement le mouvement de normativité est en marche en Corse à travers en particulier le rôle central joué par l’école normale dans la formation des enseignants et donc dans la diffusion dans la société des préceptes défendus par les tenants de la IIIe République. L’éducation en Corse est bien une « affaire d’État » car elle est le levier le plus efficace d’enracinement de l’île à la République française. Cependant nous avons pu mettre en lumière des éléments de singularité, par exemple le poids de la formation « normalienne » ainsi qu’une appréhension particulière de la laïcité et un rapport original au territoire. C’est aussi le moment de la prise de conscience de l’identité régionale et de l’émergence de la conscience linguistique corse à la veille de la Grande Guerre singulièrement dans le monde de l’éducation insulaire.

Mots clés :  Éducation, Corse, école normale, Belle Époque, acculturation.

Résumé

Introduction

L’école en Corse participa au mouvement d’enracinement de l’île à la nation française depuis le début du XIXe siècle, l’ouverture de l’école normale à Ajaccio en 1829 en fut la meilleure preuve[1], Alain Di Meglio[2] résume la portée normative de cette structuration par ces mots : « . Cet outil de formation des enseignants devait devenir un puissant vecteur de cohésion et d’adhésion nationale, au moment où la nation française était encore un chantier initié par la Révolution mais mis à mal par les alternances politiques d’un siècle chaotique. »

L’extrait d’une lettre des autorités académiques adressée au préfet[3] sous la Restauration traduisait clairement quelles étaient les dispositions de l’État durant ces premières années à l’égard de l’organisation scolaire en Corse : « L’éducation primaire bien dirigée exerce une influence puissante sur les masses de la société qu’elle maintient dans les bons principes et dont elle accroît l’aptitude pour les travaux de l’agriculture et de l’industrie tandis que l’éducation secondaire mise à la portée de tous multiplierait chez les habitants de la Corse, au-delà de toute mesure, des prétentions auxquelles l’État ne peut satisfaire ». Tout est dit…

L’intérêt d’une ouverture précoce en 1829 d’une école normale était le fruit d’une volonté de massification des savoirs primaires, pour des raisons politiques d’acculturation autour de la langue commune, le français. Le tout sur fond général de luttes d’influence entre l’Église et l’État. Pour une région périphérique comme la Corse, ce besoin de norma était un objectif clair de la part des autorités.

Ce mouvement s’accéléra sous la IIIe République avec la montée en puissance de l’école républicaine. Nous essaierons à travers certains aspects d’appréhender le degré de normativité à l’œuvre en Corse et nous tenterons de déceler des éléments spécifiques de singularité durant la période de la Belle Époque.

I Le mouvement de laïcisation[4] : symbole de la verticalité décisionnelle « Chroniques chiffrées insulaires ».

Au 31 décembre 1898, il restait à laïciser dans l’île 13 écoles publiques, Les locaux occupés par ces écoles appartenaient en propre aux communes ou bien étaient loués par les municipalités à des particuliers, à Bastia, Vicu et Bunifaziu. Le département de la Corse comptait, au 31 décembre 1899, en cours élémentaire, 730 écoles publiques et 23 écoles privées. On comptabilisait en 1899 dans les écoles publiques 968 classes. Le nombre des enseignants dans les écoles publiques était de 496 instituteurs et 493 institutrices, soit 989 au total. Aucune laïcisation n’avait été opérée pendant l’année 1899.

Il y avait durant la Belle Époque entre 46000 et 49500 élèves dans les écoles corses, avec une différence continue de 5000 élèves en faveur de la cohorte des garçons. Il restait au début du XXe siècle une dizaine d’écoles à laïciser[5]. (9 écoles élémentaires de filles, à Aiacciu, Bastia, Bunifaziu (2 écoles), Calvi, Corti, Lisula, Ulmetu, Vicu (ces 9 écoles comptaient 28 emplois). Une école privée congréganiste s’était sécularisée spontanément à la suite de l’application de la loi du 1er juillet 1901 sur les associations, il s’agissait de l’école des bénédictines d’Erbalonga. Cette école privée congréganiste avec pensionnat, s’étant dissoute, la directrice du pensionnat, après avoir revêtu l’habit laïque, produisit une déclaration d’ouverture d’école privée laïque avec pensionnat, dans le même immeuble…

L’école de filles de Bunifaziu[6] laïcisée en 1902, il ne restait plus que 8 écoles élémentaires dirigées par des congréganistes en 1903. Ces écoles étaient le reflet des dernières résistances aux laïcisations en Corse (2 à Bastia, une à Aiacciu, Calvi, Corti, Vicu, Olmetu, Lisula, comprenant 24 emplois confiés à des religieuses, quelques-uns étaient déjà occupés, depuis plus ou moins longtemps, par des adjointes laïques. À la fin de l’année1903 on recensait 747 écoles. Le nombre des classes s’était accru de 11 unités: 996 classes au lieu de 985. Deux écoles de filles furent laïcisées, celle de Bunifaziu par arrêté préfectoral du 7 février 1903, et celle de Lisula, par arrêté préfectoral du 19 septembre 1903. On comptait 999 instituteurs ou institutrices.[7]. Il restait à laïciser une école de filles à Aiacciu (7 classes), une à Vicu (2 classes), 2 à Bastia (comprenant en tout 10 classes dont 4 étaient déjà pourvues d’un personnel laïque), une à Calvi (4 classes), une à Corti (une classe), une à Ulmetu (2 classes), soit au total 7 écoles avec 22 classes à laïciser.

En 1905, les laïcisations avaient été poursuivies. Les deux écoles publiques congréganistes de filles (rue de l’Opéra et à la citadelle) furent laïcisées. Au cours de l’année 1905, les deux seules écoles privées laïques de garçons qui existaient, l’une à Murzu, l’autre à Montemaiò, cessèrent de fonctionner faute d’élèves. L’école privée congréganiste de filles de Corti fut fermée par application de la loi du 7 juillet 1904 sur la suppression de l’enseignement congréganiste, et 3 nouvelles écoles privées laïques de filles furent ouvertes: 2 à Bastia, et 1 à Corti.).

On constate d’abord la disparition en 1906 des 5 écoles congréganistes publiques qui subsistaient encore à Aiacciu (2) Calvi, Vicu et Ulmetu. Ces écoles furent en effet laïcisées par arrêté préfectoral du 30 juin 1906, avec effet au 1er septembre 1906. L’application, en Corse, des lois du 1er juillet 1901 sur les associations et du 7 juillet 1904 sur la suppression de l’enseignement congréganiste, fit disparaître toutes les écoles publiques et privées congréganistes de garçons et de filles. Au 31 décembre 1906, nous comptions 21 écoles privées laïques, avec près de 2000 élèves, dont 1700 filles [8](1 à Aiacciu, 2 à Bastia). L’enseignement congréganiste n’existait donc plus en Corse, il a fallu attendre 1914 en France. La fermeture des écoles privées congréganistes a eu pour résultat l’ouverture de 7 écoles privées laïques, dont 1 de garçons (à Bastia) et 6 de filles (2 à Aiacciu, 1 à Vicu, à Lisula, à Ulmetu et à Sartè).

La question de la laïcisation est donc pratiquement réglée en 1907 en Corse en suivant à la lettre les instructions nationales et en se conformant aux « préceptes » de l’État républicain.

II La féminisation du corps enseignant, un basculement inédit en1904!

Durant l’exercice 1901, l’article. 6 de la loi du 30 octobre 1886 enjoignant la substitution du personnel féminin au personnel masculin avait été, conformément d’ailleurs au vœu du conseil général, appliqué à 10 écoles mixtes. La substitution du personnel féminin au personnel masculin fut appliquée en 1902 à 6 écoles mixtes, et 3 institutrices avaient été nommées dans les 3 nouvelles écoles mixtes. Chaque année le mouvement se poursuivait en tenant compte, semble-t-il, des situations.

Pour le vice-recteur: « Conformément au vœu exprimé par le Conseil Général, nous continuerons à nous faire un devoir d’appliquer strictement l’art. 6 de la loi du 30 octobre 1886, qui exige cette substitution. Toutefois, de l’avis du Conseil Départemental, il y aura lieu de tenir compte de l’insalubrité de certaines écoles de plage où des hommes résisteront mieux que les femmes à l’influence de la malaria, comme aussi de l’isolement excessif de certaines localités où de jeunes institutrices peuvent n’être pas en sécurité ; enfin, des convenances personnelles de maîtres vieillis dont le changement peut s’imposer, mais qu’il serait inhumain d’envoyer dans des plages malsaines. »). Agir par humanité …

Au 31 décembre 1904, on comptait en Corse 766 écoles publiques. Les classes de 80, de 90, de 100 élèves n’étaient pas rares. Toujours à la même date, on recensait 1023 classes pour les écoles élémentaires et maternelles. L’enseignement était donné dans les écoles élémentaires et maternelles par 1029 enseignants, dont 490 instituteurs et 539 institutrices. Pour la première fois de l’histoire de l’enseignement primaire en Corse, en 1904, la cohorte de femmes enseignantes des écoles primaires dépassa nettement celle des hommes. C’était l’aboutissement d’un processus lancé quelques décennies auparavant. Il y a là une portée symbolique et prosaïque forte, au regard de la place des femmes dans la société. Ce phénomène de féminisation historiquement daté ne cessera de s’accentuer jusqu’à aujourd’hui. Ce basculement fut également effectif à l’échelle de la France entière durant cette même période[9] En 1903-1904, le nombre des institutrices, y compris celles qui étaient des personnels de direction d’école ou d’inspection, prit le pas sur celui des instituteurs[10].

Au 31 décembre 1905, on comptait en Corse 765 écoles publiques. La substitution du personnel féminin au personnel masculin avait été effectuée en 1905 dans 17 écoles mixtes. 1099 enseignants étaient recensés en 1907, et il faut surtout retenir que l’effectif des institutrices dépassait de 107 unités celui des instituteurs. Cela tient surtout au nombre considérable des écoles mixtes et à la substitution du personnel féminin au personnel masculin dans ces écoles.

III Des tentatives d’autonomie dans le système scolaire corse : des propositions étonnantes !

Confrontées à une fréquentation scolaire très irrégulière et qui durait depuis toujours, et afin de trouver des solutions en se départant des lamentations stériles habituelles, les autorités académiques du moment envisageaient sérieusement en 1912 une révolution « copernicienne »: c’était au système de s’adapter à la situation sociale ! « Nous ne sommes pas partisans de la politique de tout ou rien et nous pensons, MM. les Inspecteurs primaires et moi qu’il vaut mieux réduire à 3 heures, à 2 heures même de classe effective, la durée de la journée scolaire que de continuer à laisser l’école ouverte pendant 6 heures avec les tables vides. Je provoquerai et j’encouragerai toutes les initiatives dans ce sens28. » dixit le vice-recteur Pessemesse.

En 1913, dans un climat international tendu depuis plusieurs années, on s’inquiétait de la formation des jeunes et d’une « d’épidémie d’illettrisme » sans doute à nuancer… On avait envisagé dans les cénacles des autorités académiques de l’île un véritable « plan de formation » qui aurait bouleversé les règles établies depuis des décennies en dérogeant par exemple au volume horaire dû devant les élèves. On peut résumer la proposition ainsi: réduire les journées d’enseignement de six à quatre heures sans que cela nuise aux apprentissages (temps de concentration limité, surcharge des classes…) pour dégager une heure obligatoire à dispenser à de petits groupes de jeunes adultes. Ce projet original, ambitieux resta malheureusement lettre morte, mais il fut un jalon surprenant et instructif sur l’air du temps… Le vice-recteur Pessemesse quitta ses fonctions en Corse, cet été 1914…

Face aux difficultés matérielles récurrentes, les autorités se posèrent la question d’envisager de se substituer parfois aux communes pour réaliser des locaux scolaires adéquats… Le sentiment général qui prévalait était que les conditions étaient réunies pour améliorer la scolarisation, et donc l’éducation des enfants de cette terre, mais que les infrastructures immobilières constituaient une entrave quasi insurmontable[11]

Face à la réalité économique de l’île où l’impossibilité financière des communes empêchait inexorablement la réalisation de travaux, le vice-recteur se faisait le chantre de l’intervention de l’État auprès du préfet du département: « La seule solution qui puisse permettre de doter enfin la Corse de véritables écoles, réside dans un large concours de l’État qui prendrait complètement à sa charge la construction des locaux scolaires, grâce à des subventions pouvant atteindre 100 % dans les communes les plus pauvres ». Sur les 804 immeubles affectés au service scolaire, 196, c’est-à-dire à peu près le quart, appartenaient aux communes; les autres, au nombre de 608, étaient loués à des particuliers. La presse insulaire ne cessait depuis deux ans de dénoncer et pointer du doigt ces carences.[12]. En 1913, les inspecteurs primaires établirent un état descriptif dans leur circonscription pour mesurer au plus près la superficie dont disposaient réellement les élèves en classe, le bilan fut catastrophique ![13]

IV Concours de l’école normale : un concours élitiste en Corse à la Belle Époque

 En Corse les candidats étaient quatre fois plus nombreux que les admis, ce qui assignait à la Corse une place privilégiée parmi les départements français au regard de la sélectivité. Le vice-recteur Six[14], après avoir glané des renseignements auprès de ses collègues métropolitains, avait établi un tableau comparatif éloquent traduisant en termes qualitatifs les promotions corses. La sélection en Corse était drastique, le concours était attractif, et proportionnellement à la démographie de l’île, les cohortes de jeunes formés étaient très élevées si on les mettait en miroir avec celles d’autres territoires français. C’est une donnée factuelle et attestée très importante qui nous permet de réviser les jugements parfois erronés et répétés à l’envi au sujet de la qualité de la population scolaire corse de cette période. À titre d’exemple en 1906 on recensait en Corse, 65 candidats pour 14 postes, ce qui donnait un taux de reçus de 22 %; pour la Creuse : 25 candidats pour 13 postes, soit 52 % de reçus; pour le Doubs, 28 candidats pour 18 postes, soit 64 % d’admis; la Mayenne avait 21 candidats pour 15 postes, soit 71 % d’admis… Nous pourrions continuer la liste comparative avec d’autres départements ruraux et urbains en France, partout, les taux d’admission étaient supérieurs à 42 %!

Pour le brevet de capacité, au regard des chiffres, la Corse offrait un phénomène probablement unique en France, à savoir une quasi parité entre les candidats et les candidates: 288 garçons en 1902, contre 323 filles (on retrouve ces chiffres de façon quasi identique durant toute la période de la Belle Époque). Avec une réussite plus importante pour les filles. S’agissant du brevet supérieur, la situation s’inversait, les brevetés étaient bien plus nombreux que les brevetées. Le grand nombre de brevetés, excédentaire en Corse, offrait aux autorités la possibilité de pallier le déficit existant dans d’autres départements en France, en envoyant des jeunes diplômés corses sur le continent, ce qui fit dire au vice-recteur[15] dans une formulation singulière : « Cette profusion de brevetés, au moment où il y a pénurie dans certaines régions du continent, nous permet de travailler pour l’exportation. » ;

On constate durant la période d’étude une absence préjudiciable… Celle de l’enseignement primaire supérieur. Il n’était représenté en Corse que par 6 cours complémentaires de garçons. Il n’y avait pas de cours complémentaire de filles. L’absence d’écoles primaires supérieures était préjudiciable à la jeunesse corse et aux intérêts économiques de l’île, et ce sentiment était partagé par les autorités académiques.

V Un agent de la République laïque

 On demandait aux instituteurs et institutrices une certaine neutralité politique, ils étaient les agents de la politique nationale… Ainsi s’exprimait le vice-recteur Lamounette[16] en juin 1899 : « Dans l’ordre politique, nous ne demandons aux instituteurs que d’aimer la République et de la servir fidèlement. Je les engage une fois de plus à observer la neutralité simple et loyale. Le mandat de politique nationale qu’ils remplissent à l’école doit suffire à tous, même aux plus ardents: apprendre aux futurs citoyens leurs droits et leurs devoirs, éclairer et fortifier leur conscience, enseigner la liberté et la sincérité, faire des hommes au regard clair et droit, que les vaines formules laissent indifférents, qui savent distinguer le vrai du faux… tel est leur rôle politique. Il est assez grand pour qu’ils n’en recherchent pas, d’autres ».

L’instituteur était aussi un agent de la république « agricole ».

Dans l’esprit des autorités ministérielles, l’instituteur, cet agent public qui côtoyait les familles d’agriculteurs, de paysans au plus près et quotidiennement, avait une mission agrarienne[17], il devait par sa connaissance « primaire » jouer le rôle de diffuseur des bonnes pratiques agricoles. Il devait être, comme nous le dirions aujourd’hui, une « force de propositions » et un facilitateur, par son autorité morale et intellectuelle de la constitution des regroupements d’agriculteurs, un acteur central des créations de structures de production et des organisations de travail.

L’école primaire laïque, gratuite et obligatoire des lois Ferry (1881 et 1882) avait pour mission de former des citoyens attachés à la nation, des individus rationnels en mesure de participer au progrès économique et agricole. Cela passait notamment par l’enseignement obligatoire des sciences, de l’agriculture et de l’horticulture. Cet état d’esprit est résumé d’une certaine façon dans le discours du vice-recteur Waltz venu parler à Bastia aux enseignants des nouvelles réformes en septembre 1882 lors d’une conférence pédagogique : « ce n’est pas simplement la lettre et l’écriture qu’il faut enseigner aux enfants, mais il faut les préparer à devenir des hommes virils, capables au jour du danger de défendre glorieusement la Patrie. Et alors, s’est-il écrié, faites des promenades, des excursions dans vos vallées, dans vos montagnes. Et cela dilatera les poitrines et rendra les jambes vigoureuses. Apprenez à connaître votre pays, vos plantes, vos forêts, et par le moyen des musées scolaires, à intéresser les enfants sur les productions de la nature ».

Conformément[18] aux dispositions de la circulaire ministérielle du 18 juin 1883, remise en vigueur par celle du 12 novembre 1891, les leçons d’agriculture à l’École normale furent données aux élèves réunis de 2° et 3° année, à raison de deux conférences par semaine. Le professeur départemental donnait son point de vue sur ces mesures : « L’instituteur se trouvera ainsi en mesure de former à son tour de bons élèves ; il ne tardera pas à vulgariser les connaissances générales d’agronomie, à propager dans les campagnes les procédés rationnels et à supprimer la routine ».

C’est le message délivré par la hiérarchie scolaire et réitéré durant toute la Belle Époque, par exemple en juillet 1899 le professeur départemental d’agriculture exprimait quelles étaient les priorités d’enseignement : « L’avenir de ce beau pays dépend entièrement des progrès de l’agriculture mais les paysans sont pauvres et toute initiative paraît devoir avorter par manque d’argent. Que les instituteurs s’efforcent de les unir, de les grouper, de constituer des syndicats agricoles. La tâche n’est pas facile, mais elle est assez belle pour tenter les cœurs vaillants et les esprits généreux. ». « Plus que personne, en effet, l’instituteur peut arrêter ce mouvement de désertion qui se produit dans les communes rurales et constitue un véritable fléau pour l’agriculture. ». Des encouragements et des récompenses furent distribuées (le mérite agricole[19]).

L’implication essentielle des instituteurs dans la diffusion de l’enseignement agricole et des nouvelles connaissances culturales auprès des habitants était une réalité partagée. Ils jouèrent un rôle majeur dans certaines communes en permettant des changements de pratiques culturales, l’éducation environnementale, en améliorant des pratiques de chasse et surtout en diffusant des connaissances sur le territoire

VI Le corpus corse[20] de l’enquête Ozouf[21] fiche d’identité des institutrices et des instituteurs de la Belle Époque

73 % des enfants d’instituteurs qui avaient embrassé le métier d’enseignant étaient passés par l’école normale en France. En Corse, 100 % des enfants d’instituteurs devenus eux-mêmes enseignants étaient passés par la formation normalienne. Dans notre corpus, pour entrer à l’école normale en Corse, au regard du nombre de candidats et de candidates, le seul brevet élémentaire ne suffisait pas, il fallait presque obligatoirement (il y eut quelques aménagements selon les années) passer par le concours d’entrée et obtenir le brevet supérieur à la sortie de la formation. 69,25 % des instituteurs sont des normaliens et 69,56 % des institutrices étaient des normaliennes. Cette majorité d’enseignants issus des écoles normales d’Aiacciu a été une constante durant la période d’étude et au-delà de celle-ci en Corse, elle marque une singularité nette dans le paysage « primaire » en France.

Rester en Corse ou s’expatrier ?  En France la majorité des enseignants exerçait dans le département de naissance. En Corse, un tiers du corpus a fini sa carrière sur le continent, essentiellement en région parisienne, souvent dans le cadre de mutations doubles, principalement pour les institutrices mariées avec un instituteur ou avec un agent de la Fonction publique.

Quels engagements politiques ?

Majoritairement socialistes, 55 % s’affirmaient de gauche dans le corpus général, 72 % dans le corpus corse. Dans leurs déclarations, ils apparaissaient comme des hommes et des femmes très attachés à la liberté individuelle. Pour eux, le socialisme est consubstantiel du parlementarisme, c’est la République en mouvement. Dans leur panthéon politique, Jaurès était plébiscité loin devant les figures de Briand ou de Poincaré. Il représentait la figure tutélaire de leur idéal politique, celui qui permettait de réaliser la plus large adhésion.

La thématique de la lutte anticléricale n’était pas présente en tant que telle dans notre corpus. On parle peu de la querelle des inventaires et du mouvement de laïcisation, à l’exception de quelques références sporadiques « Lors de la fermeture des couvents et au moment des inventaires, j’ai manifesté dans la rue, un peu gêné de me trouver du côté du commissaire et du Sous-Préfet », témoignage de l’instituteur Vincent Rossi[22]. « Je me rappelle l’histoire des inventaires des biens du clergé. Étant à l’École Normale d’Ajaccio, je me souviens avoir vu les élèves du Grand Séminaire jeter leur literie par les fenêtres, sans doute pour les soustraire à cet inventaire », témoignage de l’instituteur Antoine Joseph Stefanaggi[23].

En Corse, la seule question qui comptait, était quel degré de distance entretenu avec la tradition catholique de l’île ? La majorité se disait plutôt libre penseurs, ou catholiques non pratiquants, produits de la tradition familiale et de la tradition communautaire. 27 % de la cohorte ne s’étaient pas mariés religieusement, ceux mariés religieusement par conformisme regroupaient 55 % des témoignages[24].. Beaucoup se marièrent religieusement par conformisme et non par conviction. En revanche, plus de 32 % des interrogés en Corse n’avaient pas fait baptiser leurs enfants, c’est une situation très singulière dans la société corse de l’époque. Cette décision était très souvent la décision du couple et non de la famille. Le témoignage de Charles Baptiste Battini[25] résumait assez bien la position et le vécu des enseignants du corpus insulaire : « Catholique puisque baptisé, non pratiquant; libre-penseur depuis ma jeunesse. » Aux questions « Vous êtes-vous marié religieusement? Avez-vous fait baptiser vos enfants? », il répond: « Oui, ma femme étant catholique, elle y tenait (Paris valait bien une messe…). » Tout est dit…

Ils avaient le sentiment qu’en 1914 le combat de l’école laïque était gagné. Ils étaient persuadés de l’universalité de la morale laïque. Ils portaient un regard critique sur la tradition religieuse, sans toutefois exprimer avec virulence un anticléricalisme de combat. C’est globalement ce qui ressort de l’observation croisée des réponses des femmes et des hommes du corpus

Un peu moins de la moitié avait été membre d’une amicale avant 1914 : alors qu’à l’échelle nationale le taux d’adhésion fut bien plus élevé, avec 75 % d’amicalistes en 1905. Cette tendance correspondait aux observations faites par les autorités académiques durant cette période de la Belle Époque.

Quel environnement culturel[26]? On peut souligner le rôle capital des journaux régionaux et nationaux:  On relève 56 % de lecteurs de journaux en Corse, chiffre plus élevé que celui relevé pour le corpus général, 48 %. Certaines remarques dénotent avec le sentiment général et montrent aussi la diversité des opinions, telle celle de Vincent Rossi sur l’inadaptation de leçons « pensées à Paris » pour un public scolaire corse… L’ensemble de ces éléments participe à montrer la place de l’autonomie générationnelle dans la prise de décisions. Dans le panthéon littéraire des institutrices et des instituteurs corses, on trouvait aussi bien des auteurs anciens que des auteurs contemporains devenus classiques, sous l’effet notamment de l’enseignement. Les enseignants insulaires étaient abonnés ou achetaient au numéro, les revues pédagogiques les plus en vue tel le Manuel général de l’instruction primaire par exemple. Malgré quelques indications contraires le processus d’acculturation avait fait son œuvre au sein de ces cohortes de fonctionnaires d’État.

Conclusion

Ces femmes et ces hommes ont rythmé, par leur mission et leur action, les pulsations de notre communauté insulaire. Parfois, ils ont agi en simples prescripteurs des instructions nationales, devenant ainsi des accélérateurs des mécanismes d’acculturation, mais très souvent, ils ont été de véritables agitateurs d’idées nouvelles et des pionniers des transformations sociales et politiques

À travers ces récits et les chroniques de l’éducation en Corse, nous pouvons dresser des traits communs partagés par tous les enseignants, quels que soient les territoires constitutifs de la France de la Belle Époque, mais l’intérêt d’avoir réalisé une forme de micro-histoire centrée sur la Corse au sein du vaste corpus général, exploité initialement par Jacques et Mona Ozouf, permet également de souligner des traits spécifiques : une identité singulière de ce groupe d’insulaires: le poids de la formation « normalienne » ainsi qu’une appréhension particulière de la laïcité et un rapport original au territoire.

C’est une période historique majeure pour le contexte corse (crise économique, enracinement à la IIIe République, prise de conscience de l’identité régionale et émergence de la conscience linguistique corse à la veille de la Grande Guerre), comme le dit très bien Alain Di Meglio[27] : «Cette école des « hussards noirs de la République» n’a pas empêché l’avènement d’un corsisme incarné en 1914 dans la revue A Cispra par Saveriu Paoli et Ghjacumu Santu Versini, tous deux maîtres d’école issus de l’école normale d’Ajaccio. Bien d’autres figures de l’histoire du XXesiècle sortiront de cette école normale de Corse. La plupart du temps bien ancrés dans les valeurs de gauche, mais pas exclusivement ».

Elle nous permet de réfléchir aussi sur la situation actuelle. Des continuités existent, par exemple sur la place de l’offre publique de formation de la maternelle à l’université dans un monde très ouvert et concurrentiel, sur l’importance de former les citoyens de demain au plus près de lieu de vie, de la diversité culturelle et par-dessus tout de la mission d’émancipation que constitue la diffusion des savoirs et du rôle pivot et relais que sont les enseignants dans la société. Le questionnement sur le rôle des acteurs institutionnels État, Collectivité de Corse, Communes, reste entièrement ouvert…

[1]  Elle fait partie des premières écoles normales instaurées en France, la quatrième par sa date de mise en place.

[2] Alain Di Meglio, PR émerite Università di Corsica, in I Maistrelli Institutrices et instituteurs de la Belle Époque en Corse (1890-1914), dir Denis Jouffroy, Albiana, Università di Corsica, Aiacciu, 2024, p 35

[3] Lettre au préfet du 1er juillet 1822, Archives nationales Paris F17

[4] La loi du 28 mars 1882, qui rend l’école primaire laïque, instaura « l’instruction morale et civique ». Conscient que cette mesure pouvait heurter les consciences, le pouvoir chercha l’apaisement. Dans les instructions ministérielles des 18 juillet 1882 et 18 janvier 1887, on pouvait lire ceci : « L’instituteur ne se substitue ni au prêtre ni au père de famille ; il joint ses efforts aux leurs pour faire de chaque enfant un honnête homme. » Mais l’Église s’insurgea contre cette école sans Dieu. En novembre 1882, une circulaire précisa que les signes religieux devaient être retirés des établissements En 1886 la loi Goblet imposa le personnel laïque dans les établissements scolaires. Initiée à l’école publique, l’œuvre de laïcisation s’appliquera ensuite à la société entière avec la loi de séparation des Églises et de l’État, portée à la Chambre par le député socialiste Aristide Briand. Après plus de huit mois de débats, le texte selon lequel l’État assure la « liberté de conscience », mais « ne reconnaît, ne salarie ni ne subventionne aucun culte » fut voté, puis promulgué le 9 décembre 1905.

[5] ATC Pumonti 1N 78, rapport de l’inspecteur d’académie, vice-recteur de la Corse, Ajaccio, le 15 juillet 1902.

[6] ATC Pumonti 1N 79, rapport de l’inspecteur d’académie, vice-recteur de la Corse, Ajaccio, le 23 juillet 1903. Extrait: « Suite à la création de deux écoles mixtes, celle de Ponte Novo, (Castello-di Rostino) et celle de Porto-Pollo (Serra-di-Ferro). L’école mixte de Tirolo, (Levie) a été supprimée, sur la proposition du Conseil municipal et, sur l’avis du Conseil général, sanctionné par l’autorité ministérielle. »

[7] ATC Pumonti 1N80, rapport de l’inspecteur d’académie, vice-recteur de la Corse, Ajaccio, le 7 juillet 1904.

[8] C’est ainsi qu’ont été laïcisées avec effet au 1er septembre 1906: l’école publique congréganiste de filles d’Aiacciu, dirigée par les sœurs de Saint-Joseph; l’école maternelle publique congréganiste d’Aiacciu, dirigée par les sœurs de Saint-Joseph; l’école publique congréganiste de filles de Calvi, dirigée par les sœurs de Saint-Joseph; l’école publique congréganiste de filles de Vicu, dirigée par les filles de Marie; 5) l’école publique congréganiste de filles d’Ulmetu, dirigée par les filles de Marie. Et quiont été fermées, à partir de la même date : 3 écoles privées congréganistes de garçons (1 à Aiacciu, 1 à Bastia, 1 à Sartè); 12 écoles privées congréganistes de filles (2 à Aiacciu, 3 à Bastia, 1 à Calvi, 1 à Lisula, 1 à Ulmetu, 1 à Vicu, 1 à Alata, 1 à Bunifaziu, 1 à Sartè); 3 écoles maternelles privées congréganistes

[9]  En 2022, les chiffres de l’académie de Corse sont : 25000 élèves du premier degré, 1700 enseignants et enseignantes qui se répartissent ainsi: 84 % sont des femmes et 16 % des hommes! La moyenne d’âge est de 44 ans pour les femmes et 46 ans pour les hommes (données produites par le rectorat de Corse).

[10] En 1903-1904, le nombre des instituteurs publics laïques est de 57 262, tandis que celui des institutrices publiques laïques de 57 276, Statistique de l’enseignement primaire, t. VIII, 1905.in Béatrice Compagnon, Anne Thévenin, Histoire des instituteurs et des professeurs, de 1880 à nos jours, Perrin, coll. « Tempus », Paris, 2010 (1re éd. 2001), p. 83.

[11]. « Et pourtant l’état moral est bon et s’améliore de jour en jour. Le corps des Instituteurs de la Corse est animé d’un excellent esprit. Il est foncièrement attaché à l’idée de patrie, respectueux de l’autorité el de la discipline, dévoué aux obligations de la famille, il est prêt à accorder toute sa confiance à ceux qui ont pour mission de les diriger. Quelle action bienfaisante n’exercerait-on pas avec ces braves gens si les moyens matériels le permettaient! Et c’est pourquoi il ne faut pas désespérer de l’avenir! »).

[12] D’après l’instruction du 18 janvier 1887, la superficie d’une salle de classe devait correspondre à 1,25 m2 par élève. Non seulement cette condition n’était généralement pas remplie, mais souvent, beaucoup trop souvent, l’exiguïté de la salle était telle que les élèves y étaient véritablement « entassés » et dans l’impossibilité d’exécuter les moindres mouvements

[13] La liste serait trop longue, cependant nous vous livrons un exemple pour illustrer ce marasme : l’école de Calenzana « consacrait » 0,22 m2 par enfant! Plus de 80 % des écoles étaient en infraction. Les logements pour les enseignants, et nous le savons depuis longtemps, étaient eux aussi trop souvent défaillants: à titre d’exemple, en 1913, l’inspecteur primaire de la circonscription de Calvi relevait que sur 123 logements, 103 avaient un grave défaut de chauffage (c’est ainsi qu’à Tattone, 24 enfants sont installés dans une salle de 16,75 m2, alors que les instructions du 18 janvier 1887 exigeraient une surface de 30 m2. À Rapaggio, 30 élèves disposent de 15,45 m2 au lieu des 37,5 m2 prévus par la loi; à Isolaccio (filles), 40 élèves disposent de 20,79 m2 au lieu de 50 m2 prévus par la loi; à Aleria 58 élèves disposent de 24 m2 au lieu de 72,5 m2 prévus par la loi; à Corte (7e classe garçons), 90 élèves disposent de 39 m2 au lieu des 112 m2 prévus par la loi.).

[14] ATC Pumonti, 1N 82, rapport du vice-recteur Six en juillet 1906.

[15] ATC Pumonti, 1N 71, rapport du vice-recteur Hugues en août 1895.

[16]  ATC Pumonti, 1 N 75, Rapport du vice-recteur Lamounette du 22 juin 1899 devant le conseil général de la Corse.

[17] Anne-Marie Thiesse, Ils apprenaient la France. L’exaltation des régions dans le discours patriotique, Paris, éditions de la Maison des sciences de l’homme, 1997, p 67.

[18]  Le 2 juillet 1894 : Rapport du professeur départemental d’agriculture concernant l’enseignement agricole à l’École normale d’Aiacciu.

[19]  On peut noter justement que le 10 février 1909, de nombreux instituteurs furent récompensés pour leur implication, La Corse Agricole, n°71 (p. 37). «  L’enseignement agricole dans les écoles rurales : récompenses aux instituteurs : Arrêté du 18 décembre 1908, le Ministre de l’Instruction publique a décerné : Lettres de félicitations : MM. Comiti et Quilichini, instituteurs à Sainte Lucie de Tallano ; Fontana à Pietracorbara ; Médaille d’argent et prime de 150 fr. à M. Canioni, instituteur à Olmeto ; Médaille d’encouragement en vermeil à M. Muselli, instituteur à Silvareccio ;Médaille d’encouragement en argent à M. Dias-Cavaroni, instituteur à Cagnano ; Médailles en bronze à MM. Diani, instituteur à Bonifacio, et Orsini à Ville de Petrabugno ».

[20] Après avoir établi une convention avec le Munaé(musée national de l’Éducation) , nous avons inventorié les questionnaires des institutrices et des instituteurs corses qui avaient participé à la grande enquête menée par Jacques Ozouf. De ce corpus, dont le fonds d’archives complet est détenu par le Munaé, nous avons établi un corpus corse exploitable qui se compose de 36 dossiers (23 dossiers d’institutrices, 11 dossiers d’instituteurs insulaires et 2 dossiers d’inspecteurs primaires ayant mené une partie de leur carrière en Corse).

[21] Cette enquête fut réalisée auprès de 20 000 enseignants, soit près de 4 000 questionnaires renseignés au début des années 1960. De cette belle moisson ont été tirés deux ouvrages de synthèse qui ont permis d’appréhender les grands traits de l’histoire de ces « héros » de l’enseignement primaire en France. Ozouf Jacques, Nous les maîtres d’école, Autobiographies d’instituteurs de la Belle Époque, Julliard, Paris, 1973 ; Ozouf Jacques et Mona, La République des instituteurs, Gallimard-Le Seuil, Paris, 1992.

[22]  Vincent Rossi, numéro d’inventaire ,1994 00497 Munaé in I Maistrelli institutrices et instituteurs de la Belle Époque en Corse (1890-1914) dir D Jouffroy, Albiana, Università di Corsica, Aiacciu,2024, p 238.

[23] Ibid, p225, Antoine Joseph Stefanaggi, numéro d’inventaire : 1994.00497.

[24] Les femmes sont plus nombreuses à affirmer leur foi. Sur cette question, les institutrices se disant catholiques pratiquantes représentent 18 %; les hommes, 8 % du corpus insulaire. Le poids du conformisme de la société est foncièrement palpable, au regard de témoignages sans équivoque.

[25] Ibid, p184.

[26] Voir le texte d’Eugène F-X Gherardi consacré à cette thématique in I Maistrelli institutrices et instituteurs de la Belle Époque en Corse (1890-1914) dir D Jouffroy, Albiana, Università di Corsica, Aiacciu,2024 p107-127

[27] Extrait du texte d’Alain Di Meglio in I Maistrelli institutrices et instituteurs de la Belle Époque en Corse (1890-1914) dir D Jouffroy, Albiana, Università di Corsica, Aiacciu,2024, p 43

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