“Les jours heureux”. Normes et droits universalistes du bonheur, de la Résistance à la Vème République.

Résumé

Le bonheur est une aspiration légitime du Politique et des gouvernants depuis l’époque moderne. Pour supposer au désastre et aux malheurs de la guerre, il représente un enjeu de cohésion collective et de bon gouvernement.  À l’opposé du régime de Vichy qui pose dans le malheur de la Défaite les conditions de la renaissance du pays, la Résistance intérieure et extérieure posent dès 1942 les enjeux de la renaissance française d’une nation libérée du joug allemand sous le concept du bonheur. C’est à cette construction que se consacrent les années de Gaulle et Pompidou. 

 

Mots-clés

Bonheur, politique, droit social, reconstruction, urbanisme

Abstract

Universalist standards and rights to happiness, from the Resistance to the Fifth Republic.

Happiness has been a legitimate aspiration of politicians and governments since modern times. In the face of the disasters and misfortunes of war, it represents an issue of collective cohesion and good government.  In contrast to the Vichy regime, which set the conditions for the country’s rebirth in the misfortune of the Defeat, from 1942 onwards the internal and external Resistance set out the challenges of the French rebirth of a nation freed from the German yoke under the concept of happiness. The de Gaulle and Pompidou years were devoted to this construction. 

Keywords

Happiness, politics, social law, reconstruction, urban planning

Introduction 

 

  Aborder le bonheur en termes de normes et droits c’est considérer qu’au-delà du concept, il existe un consentement institutionnel à son endroit qui l’inscrive comme bien commun susceptible d’action publique. Il existerait un processus de conscientisation menant à sa mise en œuvre. En tant qu’accélérateur de l’Histoire, les guerres qui révèlent à chacun sa fragilité existentielle, imposent à la collectivité des révisions déchirantes en justifiant le dépassement d’un présent traumatique au profit de l’anticipation d’un futur encore incertain.

        Questionner pour la France le droit au bonheur, de la Résistance à la IVe République, c’est marquer la différence avec « les conditions de bonheur » que l’écrivain Denis de Rougemont revendique pour la Suisse qui, demeurée épargnée par sa neutralité, « a eu de la chance lors de deux guerres mondiales, mais l’a méritée par ses choix, par ses prudences et par ses risques assumés »[1].  À la différence de la Suisse, il s’agit donc de se pencher sur les années charnières que constituent pour la France, la seconde guerre mondiale que caractérisent la défaite militaire de juin 1940, l’occupation allemande et la collaboration, la constitution d’une Résistance intérieure et extérieure, la libération et la transition à la IVe République.

Mais revendiquer le droit au bonheur ne saurait s’autosuffire pour qu’il se réalise. Les freins intellectuels sont légion. Le catholicisme et le protestantisme définissent le bonheur comme incongru et menace de jouissance compte-tenu de l’exigence de labeur et de repentance que le péché originel incarne pour tous.  Des siècles durant, la doctrine du salut supplée à toute recherche existentielle et personnelle du bonheur.

   Trois considérants matérialisent les modalités d’instauration du droit au bonheur :

  • L’existence préalable latente du concept même. Par ses exigences de rupture et de changement, la dialectique du malheur de la guerre au bonheur de la paix restaurée assure à cette dernière une forme d’existence sous forme d’utopie concrète à atteindre et réaliser.
  • La guerre et son cortège d’horreurs et de souffrances qui rendent le besoin du bonheur irrépressible et non ajournable.
  • L’acceptabilité sociétale et politique du droit au bonheur mais qui ne saurait complètement échapper à la constitution d’un État-providence ou d’un État social[2] instauré dans une logique de rationalité et d’efficacité à destination de tous membres de la collectivité. Mais là encore les logiques de production changent selon la nature des trois modèles reconnus que constituent le modèle social-démocrate, le modèle corporatiste et le modèle libéral[3]. Relevant du premier, l’État-providence français se veut extensif au point d’associer à la fois à la résolution de la question assurantielle, la question du logement et de la reconstruction des villes sinistrées.

       En premier, il sera rappelé les modalités de construction de la dialectique du malheur de la guerre et du bonheur de la paix. En deuxième, il importe de témoigner de l’usage opposé du concept de bonheur dans la Révolution Nationale de Vichy et celui de la Résistance intérieure et extérieure. En troisième, il s’agira d’interroger en quoi l’idéal du bonheur forgé dans la Résistance impacte le Gouvernement Provisoire de la République Française (GPRF) jusqu’à la Ve République gaullienne. Enfin, il sera signifié en quoi les années Pompidou font rupture en construisant une alternative au bonheur antérieur.

De la dialectique du malheur de la guerre à celle du bonheur de la paix. Une idée ancienne réactualisée

 

        De tout temps, la guerre est décrite comme un malheur. La violence armée militaire de l’époque moderne définit « les malheurs de la guerre ». En 1633 la série des eaux fortes de Jacques Callot appelée « les Misères et les Malheurs de la guerre » décrit les dévastations des paysages et la dislocation des corps dans la Guerre de Trente ans de 1618 à 1648.  La guerre est au cœur de la philosophie des lumières. En janvier 1767 Jean-François de la Harpe remporte « le Prix au jugement » de l’Académie française » pour son discours intitulé « Des malheurs de la guerre et des avantages de la paix ».[4] L’opposition est instituée entre guerre et paix. La première « traine à sa suite tous les malheurs »[5] tels les « carnages, désolations, destructions, meurtres, plaies cruelles… ». Ils produisent « une pauvreté générale ». La guerre est « fléau ». Les « maux de la guerre » doivent être combattus par les Princes et l’aide des philosophes pour restaurer paix et bien-être. L’injonction d’agir est de mise, « le bonheur doit donc être fruit de la paix ». Cette dernière réintroduit la prospérité qui offre à chacun, les moyens de retrouver sa place dans la société. La paix substitue au malheur, la plénitude du bonheur retrouvé :

Peuple que l’on traite avec une dureté si injurieuse, mais à qui toutes les âmes honnêtes aiment à s’intéresser, c’est dans la Paix que l’on pourra s’occuper solidement des moyens de vous rendre plus heureux…C’est lorsque la Paix sera bien affermie, que le fruit de votre labeur fera pour vous, que vous recueillerez dans la joie ce que vous aurez semé avec confiance…L’État libéré de ses nécessités cruelles verra sans envie la fortune vous sourire un moment sous vos toits de chaume, où habite presque toujours la hideuse et languissante pauvreté. Votre cœur ne sera plus resserré par le sentiment de la crainte et de la douleur…O respectables habitants des campagnes, quand verrai-je réaliser cette image d’un bonheur qui vous est dû ? [6]

    La dialectique du malheur de la guerre et du bonheur de la paix innerve les débats intellectuels autour de la première guerre mondiale. En 1915, l’écrivain pacifiste Romain Rolland dans son essai intitulé « La guerre et la paix » inspiré lui-même de Guerre et Paix de Tolstoï, oppose à la monstruosité le la tragédie humaine la nécessité de penser l’harmonie de la paix restaurée entre les peuples. Le philosophe Alain témoigne que les « cadavres et toutes ces ruines, et ces folles dépenses et ces offensives de précaution sont l’œuvre d’hommes qui n’ont jamais su être heureux et qui ne peuvent supporter ceux qui essaient de l’être ».[7] Le bonheur ne relève pas seulement d’un dû, encore moins d’un improbable et originel état de nature comme le réfute le philosophe Thomas Hobbes mais d’un devoir impérieux toujours menacé par les comportements belliqueux et impériaux.

     La perspective de l’inéluctabilité d’une nouvelle guerre franco-allemande au lendemain des accords de Munich du 30 septembre 1938 réactive la dialectique de la guerre et de la paix. Les partisans des accords considèrent que rien ne saurait justifier une nouvelle guerre fratricide. Le discours du « plus jamais ça » déployé dans les années 1920 encourage les pacifistes à envisager le maintien de la démocratie française à côté d’un Reich renforcé par l’annexion des Sudètes. Les bellicistes s’opposent au nazisme au nom d’un idéal démocratique décrit en termes d’aspirations à un monde meilleur sans pour autant bien sûr que le mot bonheur puisse être réellement évoqué. Opposant à la capitulation sans condition face à Hitler, l’écrivain Montherlant exprime toutefois son dégoût pour la France qui « est rendue à la belote et à Tino Rossi »[8].

      À défaut de pouvoir se vivre, le bonheur sur le point d’être jeté aux oubliettes de l’histoire ne peut se penser qu’au conditionnel présent.

 

De l’ascétisme gestionnaire de la Révolution nationale à la programmation du bonheur de la Résistance française intérieure et extérieure

 

       Inattendue et impensable, la défaite militaire de juin 1940 relève d’une onde de choc. Le traumatisme est individuel et collectif.  « L’étrange défaite » décrite par Marc Bloch [9] défie tout entendement. Au-delà de « la divine surprise » que représente selon Maurras l’installation du Maréchal Pétain, la production au temps présent d’une multitude de récits, mémoires et souvenirs de guerre atteste de l’impossibilité à mettre un nom sur la plaie béante de la débâcle[10]. Le 20 juin 1940, le nouveau chef de l’État le maréchal Pétain témoigne que « depuis la victoire, l’esprit de jouissance l’a emporté sur l’esprit du sacrifice ». Antisémite, antirépublicain, anticommuniste, fasciste partisan de la collaboration avec le vainqueur, le journaliste Lucien Rebatet s’inscrit dans la continuité d’un Montherlant dans sa condamnation de l’esprit de jouissance du Front populaire comme responsable de la défaite en raison de la recherche effrénée d’un bonheur jugé décadent :

 Il y avait encore à profusion le prolétaire bien nourri, rouge, frais et dodu dans une chemisette de soie, un pantalon de flanelle, d’étincelants souliers jaunes, qui célébrait avec une vanité rigolarde l’ère des vacances à la plage, de la bagnole neuve, de la salle à manger en noyer Lévitan, de la langouste, du gigot et du triple apéritif.[11]

       Le couple bonheur/jouissance forge toute analyse. Elle est surdéterminée par le discours catholique d’une Église légaliste et pétainiste qui définit le bonheur comme incongru et risque de jouissance compte-tenu de l’exigence de labeur et repentance que le péché originel doit incarner pour tous. Comme par le passé, la doctrine du salut supplée à toute recherche existentielle et individualiste du bonheur. Le 10 octobre 1940, l’éditeur Bernard Grasset en partisan du Maréchal Pétain et de la collaboration avec l’Allemagne appelle les Français au sursaut de la « nécessité de l’enthousiasme » qu’il oppose au concept de « bonheur ». Le premier du côté de l’action et de « la joie qui l’accompagne »[12]. Le cheminement des partisans de la renaissance politique nationale décrit un processus dans lequel l’action, quelle qu’elle soit, donne l’illusion d’œuvrer au redressement de la nation. Polytechnicien et Ingénieur des Ponts et Chaussées, Jean Berthelot qui représente les intérêts de la France à la commission d’armistice de Wiesbaden dirigée par le Haut Commandement allemand dans le but de définir les conditions matérielles de l’occupation des vainqueurs, s’engage de sa propre autorité à reconstruire les infrastructures détruites dans les zones déjà occupées. Il y voit le moyen de redresser le pays dans une perspective de partenariat égalitaire restauré avec l’Allemagne.[13] Sous la férule du gouvernement de Vichy, la réimplantation administrative est menée avec célérité pour mieux rompre avec les institutions et l’esprit de la IIIe République mais aussi avec celui du Front populaire considéré comme le véritable responsable de la défaite militaire. Neveu par alliance de Louis Renault, François Lehideux est nommé par le Maréchal Pétain en octobre 1940 Commissaire à la lutte contre le Chômage. Nommé le 23 février 1941, Délégué général à l’équipement national (DGEN), à rang et prérogatives de Secrétaire d’État, il est chargé par la loi du 6 avril suivant d’établir et soumettre au Gouvernement le plan décennal d’équipement du pays. Ce document publié en mai 1942 sous le gouvernement de l’amiral Darlan dans les temps mêmes où la France est encore scindée en zone libre et zone occupée répond à des objectifs de production économique et de décentralisation industrielle qui tout en s’accordant sur la nécessité de produire des cités jardins et cités satellites en substitut aux taudis et banlieues des villes[14], ne revendique aucun droit au bonheur jugé décadent. La structuration de la verticalité d’une action publique autoritaire, unilatérale et centralisée oppose au modèle républicain du citoyen le modèle corporatiste d’une organisation hiérarchisée et contrôlée dans laquelle la notion d’effort individuel et collectif productifs supplée toute vision hédoniste de la jouissance et du bien-être condamné sur l’autel de la Révolution Nationale. Le bonheur est obscène tant il renvoie à l’idéal des loisirs et du laisser-faire du Front populaire. La jouissance n’est pas exubérance. Elle est don et sacrifice de chacun à la patrie et au Maréchal [15]. La rédemption est celle du discours moral et du cheminement ascétique à emprunter sans coup férir.

        Avec l’instauration de groupes de réflexion de la Résistance intérieure et de la France Libre, la priorité de « refaire la France » est centrée, sur les enjeux de sauvegarder pour l’après-guerre les intérêts de la nation dans le respect de la culture républicaine. Les sujets abordés portent sur la démonstration de l’illégalisme juridisme et politique du régime d’un « Vichy (qui) n’est pas la France », la condamnation de la Révolution Nationale, la révélation de la collaboration d’État… Combattre l’occupant, le régime de Vichy exige de penser à la fois l’intégrité territoriale dans la poursuite de la guerre en lien avec l’Union française, l’organisation de l’État futur, la mesure de la spoliation et de la collaboration, les dommages de guerre et le renouveau d’une puissance économique meurtrie.  

       À l’inverse des partisans de la collaboration et ceux du pétainisme nostalgique d’un imaginaire social agrarien[16], la Résistance française oppose à l’ascèse sublimée d’une société corporatiste autoritaire l’idée d’une démocratie républicaine qui consacre le retour de l’humain et de la citoyenneté. Les origines cosmopolitiques de la Résistance – des communistes aux socialistes en passant par des militants chrétiens de gauche, jusqu’à des chrétiens démocrates et une droite nationaliste – justifient la revendication à un projet sociétal unificateur pour l’après-guerre. Pour les groupes d’études liés à des mouvements politiques de gauche, le Front populaire reste le modèle à suivre et à amplifier la libération venue. Dans sa diversité, la Résistance fait consensus sur la nécessité d’une démocratie sociale qui accompagne le relèvement de l’industrie française. 

     Les débats menés au sein de la Résistance ne sauraient interroger directement le bonheur ni comme idée ni comme programme. Dans la réalité d’une occupation et d’une collaboration affichées, qu’accentuent les mesures antisémites, prononcer ce mot relève de l’indécence. Il faut attendre le courant de l’année 1942 point d’inflexion de l’opinion publique, pour qu’il puisse émerger[17]. Critique du vichysme, cette dernière est réticente au port de l’étoile jaune fixée par l’ordonnance du 29 mai. Les « grandes rafles » de l’été 1942 avec leurs arrestations massives qui préparent celle du Vel d’Hiv provoquent une importante hostilité[18]. Les perspectives de la défaite de l’Allemagne nazie à l’occasion de la bataille de Stalingrad amplifient à l’automne-hiver 1942 le sentiment de victoire possible des Alliés. Un nouvel avenir est envisageable. 

       En avril 1942, de Gaulle remet à Christian Pineau un message pour la Résistance dans lequel il rappelle que « la sécurité nationale et la sécurité sociale sont…des buts impératifs conjugués »[19]. Pour préparer des « lendemains qui chantent », Jean Moulin parachuté en France dans la nuit du 31 décembre 1941 pour fédérer la Résistance propose à Londres la création d’un « Comité des Experts » pour diagnostiquer l’état de la situation française, dégager des orientations générales à honorer et proposer les mesures immédiates lors du changement de régime. Le 1er juillet 1942 est constitué auprès du Conseil National de la Résistance (CNR) le Comité général d’Études (CGE) dont Jean Moulin informe de Gaulle de son existence[20]. Composé de « neuf sages », issus pour partie de la grande bourgeoisie parlementaire, républicaine, sociale et intellectuelle, il est chargé de penser l’avenir de la France du point de la productivité de la richesse nationale et des impératifs de restructuration de la société épurée du pétainisme et collaborationnisme. Depuis Lyon le CGE soutient les analyses des cercles locaux de réflexion de la Résistance. Le juriste François de Menthon du CGE a connaissance des travaux du groupe de travail présidé par Pierre Laroque sur les questions sociales. Cet ancien conseiller d’État spécialiste des assurances sociales sous la IIIe République, membre du cabinet ministre du Travail René Belin du premier gouvernement de Vichy révoqué en octobre 1940 pour ses origines juives appartient au mouvement Combat fondé en zone libre au même moment.  Depuis son investissement dans les lois sur les assurances sociales de 1930 et 1932, il milite pour la constitution d’un système social public universel pour l’ensemble de la société française. La publication parlementaire à Londres le 2 décembre 1942 du Rapport sur l’assurance sociale et les services connexes de l’économiste William Beveridge marque un tournant majeur dans l’approche de la question sociale en France.  Pour préconiser la mise en œuvre d’une sécurité sociale égalitaire et solidaire pour tous les Anglais sur la base de l’imposition des ménages, ce projet intéresse particulièrement de Gaulle et le futur Comité Français de Libération Nationale (CFLN) créé le 3 juin 1943. La politique sociale à réaliser fait l’objet d’analyse du CGE au début en janvier 1943. Appelé à Londres, Pierre Laroque rejoint les Forces Françaises Libres au même moment. Il prend connaissance du plan Beveridge qui lui permet de penser le futur plan français de la sécurité sociale à l’origine de sa création. Le plan Beveridge connait également un important écho au sein de la Résistance intérieure[21].

        Le 27 mai 1943, se tient à Paris sous la présidence de Jean Moulin la première réunion du Conseil National de la Résistance (CNR) créé dans le but d’unifier la Résistance et les représentations politiques et syndicales afin de pouvoir offrir à l’heure de sa libération selon la formule de de Gaulle, l’image d’« un seul peuple rassemblé ». La libération de la France et le rétablissement des libertés républicaines doit être menée « dans un État d’où la justice sociale ne sera point exclue et qui aura le sens de la grandeur ».[22]  À l’été 1943, le CNR met à l’ordre du jour la rédaction d’un programme pour l’après-guerre. Si les vœux du 30 décembre du Maréchal Pétain portent sur le « malheur qui nous accable »[23], de Gaulle revendique pour sa part au soir de Noël, fraternité, entraide et amour entre français « pour refaire ensemble la chère grande et libre France »[24]. Approuvé par le CNR dans sa quatrième réunion plénière du 15 mars 1944, le programme pour l’après-guerre s’intitule Les jours heureux. Ce titre témoigne de l’inspiration des partis et mouvements de gauche soutiens d’une nouvelle république laïque et sociale et du gaullisme social réformiste au cœur du débat de la renaissance française à venir. Au-delà du « Plan d’action immédiate » qui consacre l’action de la Résistance intérieure pour débouter les troupes allemandes, atteindre les intérêts de l’occupant, paralyser la déportation et protéger les réfractaires, la seconde partie consacrée aux « mesures à appliquer pour la libération du territoire » réfléchit aux modalités d’établissement du Gouvernement provisoire de la République française (GPRF) incarnée par de Gaulle[25]. L’établissement de la démocratie au suffrage universel s’accompagne de « l’instauration d’une véritable démocratie économique et sociale » impliquant notamment « un plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens les moyens d’existence dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants des intéressés et de l’État ». Conformément à la position de de Gaulle affichée lors la conférence de Brazzaville (30 janvier-8 février 1944) tenue sur l’avenir de l’Empire par le CFLN, il est recommandé de procéder à l’«extension des droits politiques, sociaux, économiques des populations indigènes et coloniales »[26].  

    Le bonheur, selon le CNR, relève d’un bien précieux démocratique opposable à l’autoritarisme et le totalitarisme. Il n’est pas l’acquisition d’une sagesse individuelle mais résulte d’une production collective au sein d’une société rénovée dans ses objectifs politiques. Le bonheur est matérialité et non seulement spiritualité. Toutefois, il relèverait également d’une démarche collective qui ne pourrait se formaliser que par relativisme par comparaison avec le malheur et les épreuves subies dans d’autres temps ou autres lieux. De Gaulle témoigne que « le succès de l’épreuve de guerre, comme le bonheur dans la vie, n’existe que par comparaison » ? C’est à l’État et à son organisation administrative de procurer le bonheur à chaque citoyen en lui garantissant l’accès à la fois à la liberté de penser et d’agir, l’égalité entre Français, le droit au travail et au repos et à celui d’une sécurité de l’emploi, de l’aide sociale et de la retraite. À dessein, Maxime Blocq-Mascart, responsable du mouvement Organisation Civile et Militaire (OCM) et membre du CNR suggère que l’esprit de la Résistance facilite dans la paix, le bonheur « d’être chez soi » [27].  La « douceur de la liberté et de la Paix de demain » justifie le 21 février 1944, selon Missak Manoukian la veille de son exécution, le « bonheur à ceux qui vont nous survivre ».

 

L’invention du bonheur comme norme et droits universalistes du GRPF à la Ve République gaullienne  

 

       Bien que le bonheur puisse être défini comme un projet de société, il n’existe encore que sous forme de programme.  L’enjeu fondamental est bien celui d’une conversation du projet du CNR en action publique. Dans l’effervescence du débarquement, l’opération est menée avec célérité. Par l’ordonnance du CFLN du 21 avril relative à l’organisation des pouvoirs publics en France après la Libération, de Gaulle honore le principe d’égalité citoyenne du CNR en accordant aux femmes le droit de vote universel. La constitution le 3 juin 1944 du GPRF en héritier du CFLN est l’acte politique et institutionnel qui revendique la mise en œuvre du programme du CNR dans la future France souveraine. Le 9 août 1944, le GRPF confirme le droit de vote des femmes dans l’ordonnance relative au rétablissement de la légalité républicaine.

       Homme de gauche, conseiller d’État, ancien membre du CGE et délégué du CFLN en zone occupée, Alexandre Parodi incarne la continuité recherchée entre le les travaux du CNR et le nouveau gouvernement de de Gaulle. Le 9 septembre 1944, il est nommé ministre du Travail et de la sécurité sociale. Un mois plus tard, il désigne son ancien collègue Pierre Laroque en charge de dresser le premier plan national de protection sociale. Par ordonnance est instituée le 4 octobre 1945 l’organisation de la sécurité sociale « destinée à garantir les travailleurs et leurs familles contre les risques de toute nature, susceptibles de réduire ou de supprimer leur capacité de gain, à couvrir les charges de maternité et charges de famille qu’ils supportent »[28]. Les prestations prévues au titre des assurances sociales, des allocations aux vieux travailleurs salariés, aux accidents du travail et maladies professionnelles, allocations familiales et de salaire unique sont délivrées par les caisses de ce nouvel organisme. L’ordonnance du 19 octobre suivant élargit le régime des assurances sociales à toutes les personnes de nationalité française mais aussi étrangères travaillant dans un secteur autre que celui de l’agriculture[29]. Ministre du Travail à partir du 21 novembre 1945, le communiste résistant Ambroise Croizat entend poursuivre l’œuvre de son prédécesseur en réaffirmant :

« Il faut en finir avec la souffrance, l’indignité et l’exclusion. Désormais, nous mettrons l’homme à l’abri du besoin. Nous ferons de la retraite non plus une antichambre de mort mais une nouvelle étape de vie ». [30]

        La loi du 22 août 1946 sur les Prestations familiales rattachées à la sécurité sociale sous le gouvernement de Georges Bidault achève la priorisation de la protection de la famille en déconnectant les premières du salaire au bénéfice d’un système universel des allocations familiales[31]. La loi du 30 octobre intègre la réparation et l’indemnisation des accidents du travail à la sécurité sociale[32]. Au-delà du domaine purement assurantiel, les réformes introduites par le GPRF s’inscrivent dans celles recommandées par le CNR. L’aide de santé publique à la personne est rappelée. Le GPRF consacre par l’ordonnance du 2 novembre 1945 la Protection Maternelle et Infantile (PMI) selon les visites prénatales, la surveillance de l’enfant et l’éducation des mères[33]

       Le nouveau système assurantiel et social accompagne la modernisation du cadre de vie en termes de logement et de reconstruction. Raoul Dautry, polytechnicien et ancien ministre de l’Armement de la IIIe République est nommé le 16 novembre 1944, ministre de la Reconstruction et de l’urbanisme (MRU). Par l’ordonnance du 21 avril 1945 il se voit confier l’ancien Commissariat à la Reconstruction immobilière (CRI) crée le 11 octobre 1940 et intégré l’ancienne DGEN préalablement évoquée. Au titre des missions qui lui sont confiées figurent à la fois, les « questions d’habitation et de construction, y compris la lutte contre le taudis et les îlots insalubres », la « réparation des dommages de guerre causés aux biens », la conduite avec les ministères concernés « de la réparation et la reconstruction des voies publiques de communication » et « la reconstitution des établissements industriels, commerciaux et artisanaux ». Le MRU est également responsable de la conduite « des projets d’aménagement et de reconstruction dont il dirige l’application », de « la direction et du contrôle de l’activité du bâtiment et des professions », de « la distribution des contingents de matériaux ». Au sujet de « la réparation des dommages de guerre », il conduit dans le cadre du « plan d’équipement national, un plan général de reconstruction »[34].  L’étendue des missions du MRU témoigne de l’ambition réformiste d’intérêt général que le gouvernement provisoire, dans l’esprit même de la Résistance, entend réaliser pour parvenir à l’État-providence de l’après-guerre. Par l’ordonnance du 28 juin 1945 modifiée le 26 octobre suivant, l’État instaure le prélèvement sur les loyers destiné à alimenter la Caisse nationale pour l’entretien de l’habitat rural et urbain afin de participer à résoudre la crise du logement résultant de près de 500 000 logements détruits et d’un million plus ou moins dégradés[35].  L’ordonnance du 11 octobre 1945 autorise pour sa part la réquisition de n’importe quel type de locaux privés à usage d’habitation dans les communes frappées par la crise de logement et dont la vacance ou l’occupation insuffisante est confirmée[36].

       L’étendue des missions confiées au MRU et aux autres administrations centrales dans la gestion de la reconstruction du territoire sinistré témoigne de l’ambition réformiste d’intérêt général que le gouvernement provisoire réalise pour bâtir l’État-providence de l’après-guerre. La loi sur la reconstruction du 28 octobre 1946 inscrit le principe de l’indemnisation des sinistrés par la réparation des dommages subis par faits de guerre dans le cadre de la reconstruction assurée par l’aide financière octroyée par le plan Marshall [37].

        Le renouvellement des missions publiques dans les domaines du social et de l’aménagement requiert la constitution du socle institutionnel d’infrastructures pour soutenir le nouveau modèle productif du « bonheur » à atteindre. Le 24 octobre 1945 est créé par ordonnance l’Institut National d’Études Démographiques (INED), qui sous la tutelle des ministères sociaux et dirigé par Alfred Sauvy a à charge de rassembler la documentation et d’enquêter et étudier sur « les moyens matériels et moraux susceptibles de contribuer à l’accroissement quantitatif et l’amélioration qualitative de la population ». Le 3 janvier 1946, est créé par décret le Commissariat général au Plan de Modernisation et d’Équipement (CGPME)[38] qui placé sous la direction de Jean Monnet est chargé dans le contexte de la reconstruction de définir la planification économique à mettre en œuvre pour moderniser la France. Créé le 27 avril 1946 par la loi de finances l’Institut national de la statistique des études économiques (INSEE), placé sous la responsabilité de Francis-Louis Clozon est chargé de doter la puissance publique d’un appareil d’informations démographiques et sociales à même de l’éclairer dans ses choix et arbitrages. Il faudrait encore citer ici la naissance au ministère des Finances autour de 1952 d’une équipe de la comptabilité nationale menée par Claude Gruson rattachée au service central de la direction du Trésor du ministère des Finances[39].

     Les engagements de la Résistance inscrivent durablement dans le marbre les avancées majeures des points de vue social et mieux-être collectif. Par-delà le retrait de la vie politique du général de Gaulle et la restauration d’un régime parlementaire qui affirme la prédominance du pouvoir législatif sur le pouvoir exécutif, le préambule de la constitution de la IVe République du 27 octobre 1946, dans le droit fil de la Résistance et du CFLN entend bien faire fructifier les acquis de la Résistance :

La loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l’homme…La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions de vie nécessaires à leur développement. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence.

        Bien qu’« une bonne constitution ne peut suffire à faire le bonheur d’une nation (mais) une mauvaise peut suffire à faire son malheur »[40], le général de Gaulle nouveau chef de gouvernement issu de la création de la Ve République, entend bien restituer le bonheur comme projet de société et poursuivre dans la voie préalablement tracée du bonheur de la production. La création de Zones à Urbaniser par priorité (ZUP) par la loi du 31 décembre 1958 qui traduit les logiques d’un urbanisme réglementaire et technocratique préalablement engagé sous la IVe République conduit à dessiner le bonheur productif des grands ensembles urbains déployés par le ministère de la Construction à l’échelle de l’hexagone. Toutefois, dans son étude de 1963 sur les populations des grands ensembles, le sociologue René Kaes témoigne de l’émergence de problèmes psychologiques et sociaux liés de l’écart résultant entre la rapidité du processus technique et les temporalités fondamentales de l’adaptation des habitants à leur nouveau cadre de vie[41]. Au plan médiatique, la notion sarcellite qui aurait été formalisée pour la première fois en mars 1962 suite au suicide d’un habitant de cette ville, pour décrire le mal-être des habitants des cités devient le filtre obligé d’analyse des maux de la société. Dans son essai sur L’École de la violence, Michel de Saint-Pierre témoigne que, « les grands ensembles immobiliers sont des fabriques de blousons noirs »[42]. L’Aurore associe Sarcelles à la « fabrique de blousons noirs et d’école de la violence…. L’un des pires fléaux de notre société ». [43]

       Pour conserver une « répartition harmonieuse des hommes et des activités sur le territoire » est créé en 1963 la Délégation à l’Aménagement du territoire (DATAR) directement placée auprès du Premier ministre Georges Pompidou. Pour éviter le risque d’une opposition entre « Paris et le désert français », la politique mise en œuvre engage la création de métropoles d’équilibre destinées à contrebalancer l’influence de la capitale sans lui ôter le déploiement de ses missions internationales. Les  huit métropoles d’équilibre retenues par le Comité interministériel de l’Aménagement du territoire du 2 juin 1964 – Lyon-Saint-Etienne-Grenoble, Aix-Marseille, Lille-Roubaix-Tourcoing, Toulouse, Bordeaux, Nantes-Saint-Nazaire, Strasbourg et Nancy-Metz – ont pour objet de faciliter un développement territorial plus harmonieux en concentrant des activités  en  provenance  de  Paris  et  en  accueillant  des  industries,  services  et équipements susceptibles d’assurer un développement régional cohérent. À travers l’édification d’un nouveau réseau autoroutier, des nouvelles liaisons ferroviaires interurbaines, la rénovation des centres urbains anciens, le déploiement des transports collectifs infra-urbains, la mise en œuvre des coupures vertes, le renforcement de l’industrie, la décentralisation des activités tertiaires de Paris, le modèle est celui d’une métropolisation qui offre à tout habitant les conditions de développement et de vie sur place hors d’une capitale omnipotente. Ce qui est au cœur du bonheur pompidolien relève de l’accessibilité pour tous aux équipements et services de l’épanouissement individuel dans le collectif bien pensé. C’est ce que concède Pompidou même lorsqu’il précise qu’ « il faut enfin penser à l’avenir des villes des provinces-métropoles et chefs-lieux de régions en particulier, non plus à courte vue et comme une simple politique du logement, mais très largement, dans le cadre d’une politique globale d’urbanisme, éviter à ces grands ensembles urbains la croissance anarchique qu’ont connue Paris, Lyon ou Marseille et mettre à la disposition des habitants, non seulement des logements, mais les moyens de communications, les équipements  sociaux,  sportifs,  hospitaliers,  administratifs,  les  espaces  verts  que beaucoup aujourd’hui désirent et que demain tout le monde exigera » [44].

      Condamné socialement et politiquement, le bonheur productif de la modernité de la massification du logement pour tous est rejeté [45]. Au début de 1967, débutent au sein de la Direction de la Prévision du Ministre de l’Économie et des Finances (MEF) des recherches portant sur les relations entre consommation, croissance et bien-être[46].  Dans le contexte des grèves ouvrières et de la contestation estudiantine, Pompidou négocie – les 25 et 26 mai au ministère des Affaires sociales – les accords de Grenelle sur l’évolution salariale, la réduction de la durée du travail, la révision des conventions collectives, l’emploi et la formation, le droit syndical, la sécurité sociale, les allocations familiales, les personnes âgées, la fiscalité et les journées de grève. Le bonheur social assurantiel est réaffirmé.

La présidence Pompidou ou le bonheur réinventé.

       Le 16 mai 1969, au moment de candidater à la présidence de le République, Pompidou qui incarne l’amour de la France des terroirs et de ses richesses rappelle qu’il a prouvé sa capacité « à préparer des lendemains qui peuvent être, qui doivent être heureux »[47]. En retrait avec l’idéal de l’effort gaullien de la seule restauration de la puissance française il est qualifié de « Président de la République du bonheur national » dont l’usage du mot fait florès dans la presse et les médias précisément autour de 1968[48]. C’est dans un effort consenti globalement que s’affiche le but à atteindre : « Notre peuple veut être heureux. Ce n’est que dans le calme et dans la collaboration de tous qu’il en trouvera la voie »[49]

      Nul doute n’est permis. Le modèle productiviste du bonheur gaullien est sur le fond critiqué, tant, selon Pompidou, « le confort généralisé comporte en lui-même une sorte de désespérance, en tout cas d’insatisfaction »[50].

       Comment peut-il envisager résoudre le dilemme entre la nécessité du confort et son dépassement pour produire le bonheur qu’il s’assigne comme mission ? La dualité entre d’une part historicité/ruralité et d’autre part modernité/ville, fixe le cadre de son analyse dialectique. La double injonction terrienne et urbaine est donc celle de la nécessaire réconciliation entre tradition et modernité vers laquelle la modernisation économique aspire inexorablement la nation. Le médian entre tradition et modernité fixe le cadre de réflexion pompidolienne sur les formes de bonheur à atteindre. L’urbanisme et l’architecture en tant qu’outil de mise en forme de la société sont à même de porter cet idéal de mitoyenneté qu’il revendique comme seule alternative. Le mandat présidentiel s’inscrit dans l’affirmation d’un bonheur convivial et plus qualitatif que porte l’association désormais acquise entre bonheur et environnement que symbolise quelques années après le 7 janvier 1971 la constitution du modeste ministère délégué chargé de la protection de la nature et de l’environnement confié à Robert Poujade. Cette même année est créée sous la double tutelle du CGPME et du MEF le Centre de recherche sur le bien-être[51] (CEREBE) placé sous l’autorité du scientifique Philipe d’Iribarne qui interroge l’économie du bonheur. Lui-même auteur d’une Politique du bonheur [52], est nommé de 1973 à 1974 chargé de mission auprès de la présidence de la République sur les problèmes de civilisation et de condition de vie.

      Dans la mesure où le dialogue social a retrouvé ses droits, la fabrique du bonheur exige de l’État de reprendre pied sur la question de l’urbanisme et de l’aménagement. A la politique d’extension des villes par grands ensembles, sont opposées les nécessités de reconquête des centres villes paupérisés depuis la révolution industrielle. Les quartiers insalubres encore épargnés font l’objet d’opérations immobilières de grande envergure établies sur le principe de la verticalité afin d’asseoir le confort moderne pour tous les habitants en augmentant la surface par familles. Les opérations en partie financées par l’État offrent les moyens de produire leur part de logements sociaux à des fins de relogement sans pour autant nécessairement garantir toujours aux plus démunis les moyens de rester sur place [53]. Le schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme de la Région de Paris (SDAURP) de 1965, consacre la création de cinq villes nouvelles – Cergy-Pontoise, Evry, Saint-Quentin en Yvelines et Melun-Sénart – qui ont pour finalité de permettre de desserrer l’agglomération parisienne. Elles sont l’archétype d’une nouvelle modernité de faible densité qui conjure le modèle du grand ensemble en tant que cité-dortoir. Chacune d’entre elle se caractérise par un quadruple équilibre, écologique, social, économique et éducatif susceptible de garantir leur succès au-delà même de leurs erreurs et imperfections [54]. Sur le papier, les villes nouvelles incarnent l’absolu projet urbanistique pompidolien en devenant comme le fut la cité-jardin dans son concept originel, le topos de la réconciliation entre la modernité urbaine et le terroir rural. Le choix de la maison individuelle insérée dans un tissu urbain permet au Président de revendiquer pour les citadins un art de vivre refusé au grand ensemble. Si comme il l’affirmera plus tard « vivre, c’est d’abord le logement »[55], le savoir-vivre est du côté de la maison individuelle. En ce sens, Pompidou respecte le choix des Français tant il considère que le bonheur ne peut s’imposer et doit prendre en considération les aspirations profondes de ses concitoyens. La recherche d’un urbanisme situé constitué de pavillons individuels s’oppose aux principes de l’urbanisme collectif de la Charte d’Athènes et des théories de Le Corbusier. Elle permet d’interroger autrement la politique de transports engagée par Pompidou le plus souvent située du seul côté d’une augmentation généralisée de la vitesse avec la naissance de la grande vitesse des voies rapides, des grandes infrastructures autoroutières et du projet C03 ancêtre du TGV étudié dès 1969. C’est ainsi que doit s’interpréter la lettre que le président Georges Pompidou adresse à son premier ministre Jacques Chaban-Delmas le 17 juillet 1970 pour protester contre la circulaire du ministre de l’Equipement et du logement Albin Chalandon sur l’abatage des arbres en France :

 …Bien que j’aie plusieurs fois exprimé en Conseil des ministres ma volonté de sauvegarder “ partout ” les arbres, cette circulaire témoigne de la plus profonde indifférence à l’égard des souhaits du président de la République. Il en ressort, en effet, que l’abattage des arbres le long des routes deviendra systématique sous prétexte de sécurité. Il est à noter par contre que l’on n’envisage qu’avec beaucoup de prudence et à titre de simple étude, le déplacement des poteaux électriques ou télégraphiques. C’est que là, il y a des administrations pour se défendre. Les arbres, n’ont, semble-t-il, d’autres défenseurs que moi-même et il apparaît que cela ne compte pas.

La France n’est pas faite uniquement pour permettre aux Français de circuler en voiture, et quelle que soit l’importance des problèmes de sécurité routière, cela ne doit pas aboutir à défigurer son paysage. D’ailleurs une diminution durable des accidents de la route ne pourra résulter que de l’éducation des conducteurs, de l’instauration de règles simples et adaptées à la configuration de la route, alors que la complication est recherchée comme à plaisir dans la signalisation sous toutes ses formes. Elle résultera également de règles moins lâches en matière d’alcoolémie, et je regrette à cet égard que le Gouvernement se soit écarté de la position initialement retenue.

La sauvegarde des arbres plantés au bord des routes – et je pense en particulier aux magnifiques routes du Midi bordées de platanes – est essentielle pour la beauté de note pays, pour la protection de la nature, pour la sauvegarde d’un milieu humain. La vie moderne dans son cadre de béton, de bitume et de néon créera de plus en plus chez tous un besoin d’évasion, de nature et de beauté. L’autoroute sera utilisée pour les transports qui n’ont d’autre objet que la rapidité. La route, elle doit redevenir pour l’automobiliste de la fin du XXe siècle ce qu’était le chemin pour le piéton ou le cavalier : un itinéraire que l’on emprunte sans se hâter, en en profitant pour voir la France [56].

 

Conclusion

     Né de la dialectique des malheurs de la guerre et du bonheur de la paix, le bonheur comme énoncé public innerve les débats de la Résistance intérieure et extérieure dans la France de la seconde guerre mondiale. La désignation volontaire du mot bonheur dans le programme du CNR consacre pour l’après-guerre le projet d’une responsabilité élargie au plan de l’action publique revendiquée par l’État restauré dans sa souveraineté démocratique. Si la rupture apparait comme fondatrice de la Résistance intérieure et extérieure, la restauration par le général de Gaulle d’une nation républicaine qui n’a jamais failli, se traduit par le maintien à des fins d’efficience des administrations techniques de Vichy au gaullisme ainsi que des lois majeures structurantes du domaine social. Le GRPF parvient à reconstruire l’État républicain en lui conservant les services et outils antérieurs réadaptés au fil des défis rencontrés[57]. La programmation des jours heureux du CNR se réalise à travers la constitution du gaullisme de transition du gouvernement provisoire et innerve par là-même la naissance et la vie de la IVe République. La constitution progressive d’une administration attachée à la question sociale comme au cadre de vie urbain ainsi que des organismes d’études et enquêtes sur les évolutions économiques et sociétales engagent la construction du bonheur collectif comme programme et normes juridiques universelles. Les soubresauts politiques qui emportent la IVe République et cèdent la place au régime présidentiel de la Ve République et au retour de de Gaulle au pouvoir, ne peuvent proscrire dans un premier temps toute influence conceptuelle de la Résistance dans la programmation du bonheur urbain.

       Le tournant des années 1960 et la contestation de la société de masse et du capitalisme productiviste de mai 1968 définissent une rupture majeure. L’individualisation de la société met à mal toute idée de projet collectif basé comme le fut celui de la Résistance française sur l’idée d’un bonheur collectif rançon d’une victoire militaire et d’un retour à la paix. Le projet pompidolien entérine l’évolution sociétale au point de tourner le dos à toute modernisation triomphante et arrogante. Entre tradition et modernité, le chef de l’État choisit la voie de la raison. Au-delà même de la continuité du système assurantiel du GPRPF à la Ve République, on peut ainsi considérer que les années Pompidou clôturent la phase historique de construction du bonheur collectif inaugurée par la Résistance en 1942. 

[1]  Denis de Rougemont, La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux, Paris, Hachette, 1965, Rééd. Lausanne, Le livre du mois, 1969, p.8.

[1]  Denis de Rougemont, La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux, Paris, Hachette, 1965, Rééd. Lausanne, Le livre du mois, 1969, p.8.

[2] En nous référant indistinctement au concept de d’État-providence retenu par le philosophe François Ewald ou à celui opposé d’État social retenu par...

[2] En nous référant indistinctement au concept de d’État-providence retenu par le philosophe François Ewald ou à celui opposé d’État social retenu par ses détracteurs nous entendons décrire la situation d’un État qui assume les quatre piliers de la protection sociale, le droit au travail, les services publics et les politiques de « mieux-être » que définiraient notamment la prise en considération du territoire sous ses enjeux d’aménagement, de soutien à l’activité économique et à l’emploi. Voir à ce sujet, François Ewald, L’État providence, Paris, Grasset, 1986, 612 p. ; Robert Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Paris, Fayard, 1995, 490 p. ; Christophe Ramaux, « Quelle théorie pour l’État social ? Apports et limites de la référence assurantielle. Relire François Ewald 20 ans après L’État providence », Revue française des affaires sociales, 2007, janvier-mars, pp. 13-34 ; L’État social, Paris, Fayard/Editions Mille et une nuits, 2012, 472 p.

[3] Gosta Esping-Andersen, Les trois mondes de l’État-Providence, Paris, Puf, 2007, 320 p.

[3] Gosta Esping-Andersen, Les trois mondes de l’État-Providence, Paris, Puf, 2007, 320 p.

[4] M. De la Harpe, Des malheurs de la guerre...

[4] M. De la Harpe, Des malheurs de la guerre et des avantages de la paix. Discours qui a remporté le prix au jugement de l’Académie française au mois de janvier 1767, Paris, Regnard, 1767, 40 p.

[5] Ibidem, p.11.

[5] Ibidem, p.11.

[6] Ibidem, p. 30 sq.

[6] Ibidem, p. 30 sq.

[7] Alain, Propos sur le bonheur, Paris, Gallimard, 1928, p. 271.

[7] Alain, Propos sur le bonheur, Paris, Gallimard, 1928, p. 271.

[8] Henry de Montherlant, L’équinoxe de septembre, Paris, Grasset, 1938, 269 p. Cité in Clio-texte, https://clio-texte.clionautes.org/

[8] Henry de Montherlant, L’équinoxe de septembre, Paris, Grasset, 1938, 269 p. Cité in Clio-texte, https://clio-texte.clionautes.org/

[9] Marc Bloch, L’étrange défaite. Témoignage écrit en 1940, Paris, Editions Franc-Tireur Partisan, 1946, 215 p.

[9] Marc Bloch, L’étrange défaite. Témoignage écrit en 1940, Paris, Editions Franc-Tireur Partisan, 1946, 215 p.

[10] Gilles Vergnon et Yves Santamaria, (sous la direction de), Le syndrome de 1940 Un trou mémoriel ?  Paris, Riveneuve, 2015, 301 p.

[10] Gilles Vergnon et Yves Santamaria, (sous la direction de), Le syndrome de 1940 Un trou mémoriel ?  Paris, Riveneuve, 2015, 301 p.

[11] Lucien Rebatet, Les décombres, Paris, Denoël, 1942, p. 18.

[11] Lucien Rebatet, Les décombres, Paris, Denoël, 1942, p. 18.

[12] Bernard Grasset, A la recherche de la France. Notes à leur date, Paris, Grasset, 1941, p. 66.

[12] Bernard Grasset, A la recherche de la France. Notes à leur date, Paris, Grasset, 1941, p. 66.

[13] Jean Berthelot, Sur les rails du pouvoir (1938-1942), Paris, Robert Laffont, 1968, p. 65 sqq.

[13] Jean Berthelot, Sur les rails du pouvoir (1938-1942), Paris, Robert Laffont, 1968, p. 65 sqq.

[14] Rémi Baudouï, « Projets de villes nouvelles et de cités satellites sous le régime de Vichy », in Danièle Voldman (sous la direction de), « Les origines des villes nouvelles de la région parisienne (1919-1969), Les Cahiers de l’Institut d’Histoire du Temps Présent, Paris, CNRS, n°17, décembre 1990, pp. 37 sqq.

[14] Rémi Baudouï, « Projets de villes nouvelles et de cités satellites sous le régime de Vichy », in Danièle Voldman (sous la direction de), « Les origines des villes nouvelles de la région parisienne (1919-1969), Les Cahiers de l’Institut d’Histoire du Temps Présent, Paris, CNRS, n°17, décembre 1990, pp. 37 sqq.

[15] Gérard Miller, Les pousse-au-jouir du maréchal Pétain, Paris, Le Seuil, 1975, 240 p.

[15] Gérard Miller, Les pousse-au-jouir du maréchal Pétain, Paris, Le Seuil, 1975, 240 p.

[16] Yves Chalas, Vichy et l’imaginaire totalitaire, Arles, Actes de Sud, 1992, 168 p.

[16] Yves Chalas, Vichy et l’imaginaire totalitaire, Arles, Actes de Sud, 1992, 168 p.

[17] Pierre Laborie, L’opinion française sous Vichy, Paris, Le Seuil, 1990, pp. 262 sqq.

[17] Pierre Laborie, L’opinion française sous Vichy, Paris, Le Seuil, 1990, pp. 262 sqq.

[18] Pierre Laborie, « 1942 et le sort des juifs : quel tournant dans l’opinion ? », Annales, Economies, sociétés, civilisations, 48ème année, n° 3, 1993, pp. 655-666 ;

[18] Pierre Laborie, « 1942 et le sort des juifs : quel tournant dans l’opinion ? », Annales, Economies, sociétés, civilisations, 48ème année, n° 3, 1993, pp. 655-666 ;

[19] Henri Michel, les courants de pensée de la Résistance, Paris, Puf, 1962, p. 103.

[19] Henri Michel, les courants de pensée de la Résistance, Paris, Puf, 1962, p. 103.

[20] Diane de Bellescize, Les neuf sages de la Résistance. Le CGE dans la clandestinité, Paris, Plon 1979, pp. 53 sq.

[20] Diane de Bellescize, Les neuf sages de la Résistance. Le CGE dans la clandestinité, Paris, Plon 1979, pp. 53 sq.

[21] Nicole Kerschen, « L’influence du rapport Beveridge sur le plan français de sécurité sociale de 1945 », Revue française de science politique, Paris, n°4, 1995, pp. 570-595. Doi : https//doi.org/10.3406/rfsp.1995.403559 consulté le 13 février 2025.

[21] Nicole Kerschen, « L’influence du rapport Beveridge sur le plan français de sécurité sociale de 1945 », Revue française de science politique, Paris, n°4, 1995, pp. 570-595. Doi : https//doi.org/10.3406/rfsp.1995.403559 consulté le 13 février 2025.

[22] Colonel Passy, Mémoires du chef des services secrets de la France ...

[22] Colonel Passy, Mémoires du chef des services secrets de la France Libre, Paris, Odile Jacob, Rééd. 2000, p. 640.

[23] Vœux radiodiffusés du Maréchal Pétain, le 30 décembre 1943.

[23] Vœux radiodiffusés du Maréchal Pétain, le 30 décembre 1943.

[24] De Gaulle, Appel à l’union du peuple français au soir de Noël, 24 décembre 1943. 

[24] De Gaulle, Appel à l’union du peuple français au soir de Noël, 24 décembre 1943. 

[25] Le CNR, Les Jours Heureux, Edité par Libération Z.S., (s.d.), p.3.

[25] Le CNR, Les Jours Heureux, Edité par Libération Z.S., (s.d.), p.3.

[26] Ibidem, pp. 6 sq.

[26] Ibidem, pp. 6 sq.

[27] Maxime Blocq-Mascart, Chroniques de la Résistance, Paris, Corréa, 1945, p. 345

[27] Maxime Blocq-Mascart, Chroniques de la Résistance, Paris, Corréa, 1945, p. 345

[28] Ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale.

[28] Ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale.

[29] Ordonnance n° 45-2454 du 19 octobre 1945 sur le régime des Assurances sociales applicable aux assurés des professions non agricoles.

[29] Ordonnance n° 45-2454 du 19 octobre 1945 sur le régime des Assurances sociales applicable aux assurés des professions non agricoles.

[30] In discours de la CGT-culture pour la panthéonisation d’Ambroise Croizat, 23 mars 2023. https://www.cgt-culture.fr/discours-de-la-cgt-culture...

[30] In discours de la CGT-culture pour la panthéonisation d’Ambroise Croizat, 23 mars 2023. https://www.cgt-culture.fr/discours-de-la-cgt-culture-pour-la-pantheonisation-dambroise-croizat-21145/ Consulté le 25 janvier 2025.

[31] Loi du 22 août 1946

[31] Loi du 22 août 1946

[32] Loi du 30 octobre 1946

[32] Loi du 30 octobre 1946

[33] Ordonnance du 2 novembre 1945

[33] Ordonnance du 2 novembre 1945

[34] Ordonnance n°45-772 du 21 avril 1945 relative aux attributions du ministère de la reconstruction et de l’urbanisme.

[34] Ordonnance n°45-772 du 21 avril 1945 relative aux attributions du ministère de la reconstruction et de l’urbanisme.

[35] Ordonnance n° 45-1421 du 28 juin 1945 portant création de la caisse nationale d'entretien et d'amélioration de l'habitat urbain et rural.

[35] Ordonnance n° 45-1421 du 28 juin 1945 portant création de la caisse nationale d'entretien et d'amélioration de l'habitat urbain et rural.

[36]  Ordonnance n°45-2394 du 11 octobre 1945 instituant des mesures exceptionnelles et temporaires en vue de remédier à la crise du logement. 

[36]  Ordonnance n°45-2394 du 11 octobre 1945 instituant des mesures exceptionnelles et temporaires en vue de remédier à la crise du logement. 

[37] Loi n° 46-2389 du 28 octobre 1946 sur les dommages de guerre.

[37] Loi n° 46-2389 du 28 octobre 1946 sur les dommages de guerre.

[38] Décret n°46-2 du 3 janvier 1946.

[38] Décret n°46-2 du 3 janvier 1946.

[39] François Fourquet, Les comptes de la puissance, Paris, Ed. Recherches, 1980, 462 p.

[39] François Fourquet, Les comptes de la puissance, Paris, Ed. Recherches, 1980, 462 p.

[40] Propos du juriste constitutionnaliste Guy Carcassonne au sujet de la Constitution de 1958.

[40] Propos du juriste constitutionnaliste Guy Carcassonne au sujet de la Constitution de 1958.

[41] René Kaes, Vivre dans les grands ensembles, Paris, Éditions ouvrières, 1963, 343 p.

[41] René Kaes, Vivre dans les grands ensembles, Paris, Éditions ouvrières, 1963, 343 p.

[42] Michel de Saint-Pierre, L’école de la ...

[42] Michel de Saint-Pierre, L’école de la violence, Paris, La Table-Ronde, 1962, p. 33.

[43] L’Aurore, 2 juillet 1962, cité in Thibault Tellier, « Les jeunes des ZUP : nouvelle catégorie sociale de l’action publique durant les Trente Glorieuse », Histoire@Politique. Politique, culture, société, n°4, janvier- avril 2008, p. 9.

[43] L’Aurore, 2 juillet 1962, cité in Thibault Tellier, « Les jeunes des ZUP : nouvelle catégorie sociale de l’action publique durant les Trente Glorieuse », Histoire@Politique. Politique, culture, société, n°4, janvier- avril 2008, p. 9.

[44] Discours de Georges Pompidou sur la Région parisienne à l’Assemblée nationale, le 18 juin 1965.

[44] Discours de Georges Pompidou sur la Région parisienne à l’Assemblée nationale, le 18 juin 1965.

[45] ( Sous la direction de) Mathieu Flonneau, Christine Manigand, ...

[45] ( Sous la direction de) Mathieu Flonneau, Christine Manigand, Emilia Robin, Georges Pompidou et une certaine idée de la France heureuse, Lausanne, Peter Lang, 2018, 300 p.

[46] Philippe d’Iribarne, « L’économie du bonheur : qu’attendre de racines oubliées ? » Sciences et bonheur, n°1, automne 2016, pp.9-10.

[46] Philippe d’Iribarne, « L’économie du bonheur : qu’attendre de racines oubliées ? » Sciences et bonheur, n°1, automne 2016, pp.9-10. file:///C:/Users/remib/OneDrive/Bureau/sb_1011%20l'%C3%A9conomie%20du%20bonheur.pdf Consulté le 15 février 2025.

[47] Cité In Sabrina Tricaud, Les années Pompidou, Paris, Belin, 2014, p. 17.

[47] Cité In Sabrina Tricaud, Les années Pompidou, Paris, Belin, 2014, p. 17.

[48] Rémy Pawin, Histoire du bonheur en France depuis 1945, Paris, Robert Laffont, 2013, p. 45 et suivantes.

[47] Cité In Sabrina Tricaud, Les années Pompidou, Paris, Belin, 2014, p. 17.

[49] Discours de Georges Pompidou devant l’Assemblée nationale, le 14 mai 1968.

[49] Discours de Georges Pompidou devant l’Assemblée nationale, le 14 mai 1968.

[50] Georges Pompidou, Le nœud gordien, Paris, Plon,1974, cité in « Pompidou un dessein pour la France », Les Echos, ttps://www.lesechos.fr/bourse.

[50] Georges Pompidou, Le nœud gordien, Paris, Plon,1974, cité in « Pompidou un dessein pour la France », Les Echos, ttps://www.lesechos.fr/bourse.

[51] Dans son esprit, bonheur et bien-être...

[51] Dans son esprit, bonheur et bien-être sont des synonymes. Philippe d’Iribarne, La politique du bonheur, Paris, Le Seuil, 1973, p. 17

[52] Philippe d’Iribarne, La politique du bonheur, Ibidem.

[52] Philippe d’Iribarne, La politique du bonheur, Ibidem.

[53] Henri Coing, Rénovation urbaine et changement social. L’îlot n°4, Paris 13ème, Paris, Éditions Ouvrières, 1966, 296 p.

[53] Henri Coing, Rénovation urbaine et changement social. L’îlot n°4, Paris 13ème, Paris, Éditions Ouvrières, 1966, 296 p.

[54] Jean-Eudes Roullier, « Les villes nouvelles », In L’aménagement du territoire, (sous la direction de Maurice Vaïsse et François Caron), Paris, L’Harmattan, 1999, p. 78.

[54] Jean-Eudes Roullier, « Les villes nouvelles », In L’aménagement du territoire, (sous la direction de Maurice Vaïsse et François Caron), Paris, L’Harmattan, 1999, p. 78.

[55] Georges Pompidou, discours prononcé au District de la Région parisienne, le 18 novembre 1971.

[55] Georges Pompidou, discours prononcé au District de la Région parisienne, le 18 novembre 1971.

[56] Mathieu Flonneau « L’automobile au défi de ses excès. Le moment Pompidou, le « tout automobile », mythes et réalités », In Georges Pompidou et la modernité (Sous la direction de Pascal Griset), Bruxelles, 2006, Peter Lang, p.34 sq.

[56] Mathieu Flonneau « L’automobile au défi de ses excès. Le moment Pompidou, le « tout automobile », mythes et réalités », In Georges Pompidou et la modernité (Sous la direction de Pascal Griset), Bruxelles, 2006, Peter Lang, p.34 sq.

[57] Robert O. Paxton, La France de Vichy,1940-1944, Paris, Le Seuil, 1972, 464 p.

[57] Robert O. Paxton, La France de Vichy,1940-1944, Paris, Le Seuil, 1972, 464 p.

[1]  Denis de Rougemont, La Suisse ou l’histoire d’un peuple heureux, Paris, Hachette, 1965, Rééd. Lausanne, Le livre du mois, 1969, p.8.

[2] En nous référant indistinctement au concept de d’État-providence retenu par le philosophe François Ewald ou à celui opposé d’État social retenu par ses détracteurs nous entendons décrire la situation d’un État qui assume les quatre piliers de la protection sociale, le droit au travail, les services publics et les politiques de « mieux-être » que définiraient notamment la prise en considération du territoire sous ses enjeux d’aménagement, de soutien à l’activité économique et à l’emploi. Voir à ce sujet, François Ewald, L’État providence, Paris, Grasset, 1986, 612 p. ; Robert Castel, Les métamorphoses de la question sociale. Une chronique du salariat, Paris, Fayard, 1995, 490 p. ; Christophe Ramaux, « Quelle théorie pour l’État social ? Apports et limites de la référence assurantielle. Relire François Ewald 20 ans après L’État providence », Revue française des affaires sociales, 2007, janvier-mars, pp. 13-34 ; L’État social, Paris, Fayard/Editions Mille et une nuits, 2012, 472 p.

[3] Gosta Esping-Andersen, Les trois mondes de l’État-Providence, Paris, Puf, 2007, 320 p.

[4] M. De la Harpe, Des malheurs de la guerre et des avantages de la paix. Discours qui a remporté le prix au jugement de l’Académie française au mois de janvier 1767, Paris, Regnard, 1767, 40 p.

[5] Ibidem, p.11.

[6] Ibidem, p. 30 sq.

[7] Alain, Propos sur le bonheur, Paris, Gallimard, 1928, p. 271.

[8] Henry de Montherlant, L’équinoxe de septembre, Paris, Grasset, 1938, 269 p. Cité in Clio-texte, https://clio-texte.clionautes.org/

[9] Marc Bloch, L’étrange défaite. Témoignage écrit en 1940, Paris, Editions Franc-Tireur Partisan, 1946, 215 p.

[10] Gilles Vergnon et Yves Santamaria, (sous la direction de), Le syndrome de 1940 Un trou mémoriel ?  Paris, Riveneuve, 2015, 301 p.

[11] Lucien Rebatet, Les décombres, Paris, Denoël, 1942, p. 18.

[12] Bernard Grasset, A la recherche de la France. Notes à leur date, Paris, Grasset, 1941, p. 66.

[13] Jean Berthelot, Sur les rails du pouvoir (1938-1942), Paris, Robert Laffont, 1968, p. 65 sqq.

[14] Rémi Baudouï, « Projets de villes nouvelles et de cités satellites sous le régime de Vichy », in Danièle Voldman (sous la direction de), « Les origines des villes nouvelles de la région parisienne (1919-1969), Les Cahiers de l’Institut d’Histoire du Temps Présent, Paris, CNRS, n°17, décembre 1990, pp. 37 sqq.

[15] Gérard Miller, Les pousse-au-jouir du maréchal Pétain, Paris, Le Seuil, 1975, 240 p.

[16] Yves Chalas, Vichy et l’imaginaire totalitaire, Arles, Actes de Sud, 1992, 168 p.

[17] Pierre Laborie, L’opinion française sous Vichy, Paris, Le Seuil, 1990, pp. 262 sqq.

[18] Pierre Laborie, « 1942 et le sort des juifs : quel tournant dans l’opinion ? », Annales, Economies, sociétés, civilisations, 48ème année, n° 3, 1993, pp. 655-666 ;

[19] Henri Michel, les courants de pensée de la Résistance, Paris, Puf, 1962, p. 103.

[20] Diane de Bellescize, Les neuf sages de la Résistance. Le CGE dans la clandestinité, Paris, Plon 1979, pp. 53 sq.

[21] Nicole Kerschen, « L’influence du rapport Beveridge sur le plan français de sécurité sociale de 1945 », Revue française de science politique, Paris, n°4, 1995, pp. 570-595. Doi : https//doi.org/10.3406/rfsp.1995.403559 consulté le 13 février 2025.

[22] Colonel Passy, Mémoires du chef des services secrets de la France Libre, Paris, Odile Jacob, Rééd. 2000, p. 640.

[23] Vœux radiodiffusés du Maréchal Pétain, le 30 décembre 1943.

[24] De Gaulle, Appel à l’union du peuple français au soir de Noël, 24 décembre 1943. 

[25] Le CNR, Les Jours Heureux, Edité par Libération Z.S., (s.d.), p.3.

[26] Ibidem, pp. 6 sq.

[27] Maxime Blocq-Mascart, Chroniques de la Résistance, Paris, Corréa, 1945, p. 345

[28] Ordonnance n° 45-2250 du 4 octobre 1945 portant organisation de la sécurité sociale.

[29] Ordonnance n° 45-2454 du 19 octobre 1945 sur le régime des Assurances sociales applicable aux assurés des professions non agricoles.

[30] In discours de la CGT-culture pour la panthéonisation d’Ambroise Croizat, 23 mars 2023. https://www.cgt-culture.fr/discours-de-la-cgt-culture-pour-la-pantheonisation-dambroise-croizat-21145/ Consulté le 25 janvier 2025.

[31] Loi du 22 août 1946

[32] Loi du 30 octobre 1946

[33] Ordonnance du 2 novembre 1945

[34] Ordonnance n°45-772 du 21 avril 1945 relative aux attributions du ministère de la reconstruction et de l’urbanisme.

[35] Ordonnance n° 45-1421 du 28 juin 1945 portant création de la caisse nationale d’entretien et d’amélioration de l’habitat urbain et rural.

[36]  Ordonnance n°45-2394 du 11 octobre 1945 instituant des mesures exceptionnelles et temporaires en vue de remédier à la crise du logement. 

[37] Loi n° 46-2389 du 28 octobre 1946 sur les dommages de guerre.

[38] Décret n°46-2 du 3 janvier 1946.

[39] François Fourquet, Les comptes de la puissance, Paris, Ed. Recherches, 1980, 462 p.

[40] Propos du juriste constitutionnaliste Guy Carcassonne au sujet de la Constitution de 1958.

[41] René Kaes, Vivre dans les grands ensembles, Paris, Éditions ouvrières, 1963, 343 p.

[42] Michel de Saint-Pierre, L’école de la violence, Paris, La Table-Ronde, 1962, p. 33.

[43] L’Aurore, 2 juillet 1962, cité in Thibault Tellier, « Les jeunes des ZUP : nouvelle catégorie sociale de l’action publique durant les Trente Glorieuse », Histoire@Politique. Politique, culture, société, n°4, janvier- avril 2008, p. 9.

[44] Discours de Georges Pompidou sur la Région parisienne à l’Assemblée nationale, le 18 juin 1965.

[45] ( Sous la direction de) Mathieu Flonneau, Christine Manigand, Emilia Robin, Georges Pompidou et une certaine idée de la France heureuse, Lausanne, Peter Lang, 2018, 300 p.

[46] Philippe d’Iribarne, « L’économie du bonheur : qu’attendre de racines oubliées ? » Sciences et bonheur, n°1, automne 2016, pp.9-10. file:///C:/Users/remib/OneDrive/Bureau/sb_1011%20l’%C3%A9conomie%20du%20bonheur.pdf Consulté le 15 février 2025.

[47] Cité In Sabrina Tricaud, Les années Pompidou, Paris, Belin, 2014, p. 17.

[48] Rémy Pawin, Histoire du bonheur en France depuis 1945, Paris, Robert Laffont, 2013, p. 45 et suivantes.

[49] Discours de Georges Pompidou devant l’Assemblée nationale, le 14 mai 1968.

[50] Georges Pompidou, Le nœud gordien, Paris, Plon,1974, cité in « Pompidou un dessein pour la France », Les Echos, ttps://www.lesechos.fr/bourse.

[51] Dans son esprit, bonheur et bien-être sont des synonymes. Philippe d’Iribarne, La politique du bonheur, Paris, Le Seuil, 1973, p. 17

[52] Philippe d’Iribarne, La politique du bonheur, Ibidem.

[53] Henri Coing, Rénovation urbaine et changement social. L’îlot n°4, Paris 13ème, Paris, Éditions Ouvrières, 1966, 296 p.

[54] Jean-Eudes Roullier, « Les villes nouvelles », In L’aménagement du territoire, (sous la direction de Maurice Vaïsse et François Caron), Paris, L’Harmattan, 1999, p. 78.

[55] Georges Pompidou, discours prononcé au District de la Région parisienne, le 18 novembre 1971.

[56] Mathieu Flonneau « L’automobile au défi de ses excès. Le moment Pompidou, le « tout automobile », mythes et réalités », In Georges Pompidou et la modernité (Sous la direction de Pascal Griset), Bruxelles, 2006, Peter Lang, p.34 sq.

[57] Robert O. Paxton, La France de Vichy,1940-1944, Paris, Le Seuil, 1972, 464 p.

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