Le 09 thermidor (27 juillet 1794) marqué par la chute de Robespierre représente la fin du régime de la Terreur, mais il ne fût pas le seul responsable. Les Maçons vont reprendre le chemin des Loges en se comptant car un nombre important manque à l’appel. Il va y avoir de fait, une recomposition de la Franc-maçonnerie et du travail réalisé en Loges. Elle va être plus unie qu’avant la Révolution et ne faire qu’une avec le pouvoir et celui-ci est détenu par Bonaparte. Je cite l’historien Albert Mathiez décédé en 1932 et spécialiste de la Révolution, qui écrivit au sujet de la Maçonnerie :
« La Franc-maçonnerie nouvelle, celle qui s’organise autour du Premier Consul, est toute différente de l’ancienne. Autant celle-là était hétérogène, autant celle-ci est unifiée. Elle ne comprend plus que des hommes unis par la même solidarité, celle que la Révolution a forgée. Elle est devenue le refuge et la citadelle de tous ceux qui ont bénéficié de la crise qui touche à sa fin. Elle se serre autour de Bonaparte qui la protège de son épée et de sa popularité ».
Pour quelle raison Bonaparte va-t-il se positionner en faveur de la Franc-maçonnerie et même favoriser son développement ?
Il faut prendre en compte deux éléments importants :
A. La religion et les rapports de Bonaparte avec le Pape :
En fin politicien et je vais jusqu’à dire en fin stratège, le Premier Consul va bien saisir les enjeux du pouvoir et il sait pertinemment qu’il va avoir besoin du Pape Pie VII pour légitimer son autorité, lui qui contrairement au roi n’est pas d’essence divine et ne tient pas son pouvoir de Dieu comme les rois catholiques. Il va faire preuve de bonne volonté, du moins en apparence, n’oublions pas le concordat signé le 15 juillet 1801 avec le Saint-Siège qui a pour objectif de calmer les tensions, pour ne pas dire plus, résultant de la Révolution en reconnaissant que le catholicisme est la religion de la grande majorité des Français. Bien entendu, cette signature n’a été possible qu’au prix de certains compromis et Bonaparte n’hésite pas à sacrifier ce qui ne lui est pas utile. Il est véritablement dans une stratégie de reconnaissance de son pouvoir. Les sacrifiés de ce concordat sont les Théophilanthropes. Cette religion à l’origine destinée à se substituer au catholicisme et se libérer de l’emprise du Pape est donc née. C’est un mouvement déiste, basé sur l’amour de Dieu et des hommes. Ils se réunissaient dans les églises catholiques de 1797 à 1801 pour célébrer un culte inspiré de l’Etre suprême, religion de substitution créée par les révolutionnaires. Le 05 octobre 1801, un arrêté consulaire leur interdit l’accès aux églises selon le souhait du nonce Spina qui veut mettre fin à une profanation des lieux saints catholiques.
Un clin d’œil …. Le 10 juillet 1804, Jean-Etienne-Marie Portalis est nommé ministre des Cultes… alors qu’il est Maçon.
Bonaparte sait que le Saint-Siège est un partenaire exigeant, et il ne veut pas se lier exclusivement à l’Eglise. Là encore le stratège pointe son nez, il souhaite mettre en place une sorte de contre-pouvoir et la Maçonnerie renaissante lui semble parfaite dans ce rôle à condition de pouvoir la contrôler de l’intérieur. Le développement de la Franc-maçonnerie favorisé par Bonaparte puis Napoléon va vite prospérer :
- Fin 1800 : 74 Loges
- En 1802 : 114
- 1804 : 300
- 1806 : 664
- 1810 : 1 161
- 1814 (chute de l’Empire) : 1 219
Il convient de rajouter les Loges militaires.